Réflexions littéraires
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Portrait d’un être fictif : Holden Caulfield, mon ami, mon amour

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Ce grand classique qui n’a plus besoin de présentation, L’attrape-coeurs est toujours lu et acheté. Publié pour la première fois en 1951 par le discret J. D. Salinger, The Catcher in the Rye est devenu un des bouquins américains des plus lus aux États-Unis. Vendu à plus de 60 millions d’exemplaires partout autour du globe, je ne suis certainement pas la seule complètement folle et marquée par l’histoire fort simple du jeune Holden Caulfield. À la différence près, que L’attrape-coeurs est le livre le plus important et significatif de ma vie. Longtemps, je disais qu’il était mon préféré, mais en le relisant j’ai constaté que non.

Ce n’est pas le genre de roman où je bois littéralement le choix des mots. Vous savez ce genre de roman où vous sentez que les mots coulent d’eux-mêmes, vous lisez et vous avez l’impression de lire 100 fois mieux qu’à l’habitude tellement il y a une justesse dans la danse que font toutes ces lettres entre elles? Et bien, L’attrape-coeurs ce n’est pas ça. J’irais même jusqu’à dire que, souvent on se doit d’arrêter notre lecture pour relire les mots passés, le style d’écriture de J. D. Salinger n’en est pas un des plus « beaux » et « poétiques » au sens où je l’entends. Et encore là, la version française tout de même très respectable ne rend pas entièrement hommage au jeu du langage qu’offre The Catcher in the Rye. Ce que j’essaie d’expliquer c’est que même si une des forces les plus indéniables du bouquin est le style langagier d’Holden et cette façon, bien américaine et jeune, de parler et d’écrire, ce qui m’a touchée et changée à jamais est la conception ultime du personnage de Holden Caulfield.

Certains l’ont nommé le premier punk de la littérature américaine et bien que je ne sois pas en désaccord, pour moi, il s’agit du premier personnage adolescent imparfait que j’ai rencontré. Holden est arrivé dans ma vie au bon moment. Je venais de prendre une pause d’étude à 18 ans. J’avais annulé ma session et je ne savais pas du tout ce que je voulais faire de ma vie. Tout comme Holden, j’avais un gros sentiment d’imposture quant au monde des adultes qui me déboutait, mais aussi une folle envie de sortir du monde des jeunes. Je voulais être une adulte sans les responsabilités et tout ce que ça comporte.

Le côté irrévérencieux d’Holden, son langage bien ancré d’un Je-m’en-foutisme, et ses pensées que sa place et que la vie doivent bien être autre chose, être plus que cela, m’ont fait tant de bien.

C’est exactement lors de cette lecture que j’ai compris toute la force de la littérature. En me liant d’amitié virtuelle avec Holden, je me sentais comprise, moins seule, et ce, beaucoup plus qu’en entendant mes amies me comprendre et me rassurer. C’était en tournant les pages de L’attrape-coeurs que je m’entendais dire : c’est correct, tout ira bien. Ces mots, non écrits dans le bouquin, me sont venus d’un personnage et, en soi, c’est fabuleux. Tous les lecteurs ont LEUR personnage, celui qui vient changer une parcelle d’eux-mêmes et je trouve tellement que c’est merveilleux. Les bienfaits de la lecture sont infinis et dans mon parcours de lectrice, je puise dans ces rencontres avec des personnages pour y découvrir des parcelles d’eux qui pourraient m’inspirer, me rassurer et tant de choses aussi.

Holden Caulfield, mon amour, mon ami. Je te relirai toute ma vie simplement pour me rappeler que les livres font de la magie. Ils m’ont appris à être fière, droite et simplement moi-même. Ce genre d’apprentissage vaut de l’or et je te dirai jamais assez merci pour cette première lecture, pour ce week-end à New York des plus ordinaires qui est venu me confirmer que : je ne suis pas seule. Et ces simples mots, Holden, m’ont permis aujourd’hui d’être à ma place, même si le chemin n’était pas le plus facile, ni le plus envieux. Tu m’as permis d’être moi, de faire ce que j’aime, et surtout, tu m’as appris qu’on a le droit de dire : je m’en fou.

Je terminerai en te disant Holden, que j’ai un peu réalisé ton rêve grâce à toi, avec toi :

« Mon rêve, c’est un livre qu’on arrive pas à lâcher et quand on l’a fini on voudrait que l’auteur soit un copain, un super-copain et on lui téléphonerait chaque fois qu’on en aurait envie. »

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Lectrice invétérée, Martine est bachelière en études littéraires et la cofondatrice du Fil rouge. Créative et inspirée, elle a l’ambition de faire du Fil rouge un lieu de rassemblement qui incite les lectrices à prendre du temps pour elles par le biais de la lecture. Féministe, elle s’intéresse aux paradoxes entourant les mythes de beauté et la place des femmes en littérature. Elle tentera, avec ses projets pour Le fil rouge, de décomplexer et de dédramatiser le fait d’être une jeune adulte dans une société où tout le monde se doit de paraitre et non d’être. Vivre sa vie simplement et entourée de bouquins, c’est un peu son but. L’authenticité et l’imperfection, voilà ce qui lui plait.

Un commentaire

  1. Denise Thibault says

    Bravo Martine et à toute l’équipe de Fil Rouge de nous offrir la chance de connaître tous ces bouquins. Très apprécié et continuez votre beau travail!

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