Mardi 14 novembre,
Ça y est, c’est le moment de l’année où on commence les séances alors que le soleil est déjà couché. C’est dans la salle L’annexe du café Perko qu’on se rassemble pour cette troisième séance. C’est toujours un plaisir de s’y retrouver puisque nous avons l’espace entièrement pour nous. C’est plus intime et nous sommes sures de ne pas déranger les gens qui étudient à la table d’à côté.
Notre lecture du mois : Animitas de Nicholas Dawson, roman qui nous a toutes captivées par sa couverture énigmatique et sa quatrième de couverture, dont nous reparlerons d’ailleurs pendant la séance.
Après avoir commandé une bonne quantité de chocolat chaud et de chai latté, on se lance dans le corps du sujet : alors qu’en avez-vous pensé ?
Les jeux de narration
La première chose de laquelle nous avons parlé, c’est la différence de ton entre la première et la seconde partie. Il y a sans aucun doute une plus grande distance au début. C’est beaucoup plus sobre, plus froid. Cela nous a toutes un peu surprise, au départ, puisque nous avions affaire au point de vue distant d’un enfant, l’enfant comme le nomme l’auteur.
Plusieurs ont apprécié la seconde partie, plus personnelle, qui nous aidait à vraiment mieux saisir le choix de ton dans la première partie. Dans l’un des articles que nous avions mis dans le PDF du mois, on y parlait d’une prise de conscience qui justifie le changement de voix. C’est aussi ce qui ressort dans nos conversations. C’est un choix audacieux qui, une fois le livre refermé, nous semble tout à fait cohérent.
N’empêche que cela a presque rebuté certaines participantes qui, finalement, ne regrettent aucunement d’avoir poussé un peu plus loin leur lecture.
L’exil
Aucune des femmes autour de la table n’a vécu un exil tel que celui raconté dans Animitas. Nous semblons, par contre, toutes connaître quelqu’un qui a immigré au Québec à l’enfance et les récits qui nous furent racontés concordent aussi avec ce que nous avons lu dans ce roman.
Les années comptées en hiver, la peur du froid, le double exil des parents qui voient leurs enfants s’identifier à une culture qui n’est pas la leur, etc. Le tout vécu à travers les yeux d’un enfant qui se sent chez lui, ici.
Il y a, tout au long de l’œuvre, plusieurs doubles deuils qui prennent forme et qui, en peu de mots, sont mis de l’avant d’une façon qui nous a toutes beaucoup plu. En effet, malgré le fait qu’il n’y ait pas de dialogues ni véritablement de descriptions physiques des personnages, on comprend, entre les lignes, le désarroi, la peine, le mal-être. L’auteur réussit avec une étonnante simplicité à rendre les émotions, sans flaflas.
Nous avons trouvé que le manque de descriptions n’était pas contraignant, au contraire, il nous permettait de se concentrer sur la nature humaine des personnages, de connecter avec eux à un autre niveau, plus universel. Et ça, c’est beau.
L’intrigue de la couverture et du titre
On ne pouvait passer 1h30 à parler du livre sans s’arrêter sur la couverture et le titre. Après s’être questionnées sur le choix d’avoir mis plusieurs passages en espagnol, sans traduction, nous nous sommes aussi demandé ce que pouvait bien vouloir dire Animitas. Ce n’est que dans la seconde partie du roman qu’on fait face à face avec le terme, lorsque le personnage – ou l’alter ego de l’auteur – se retrouve au Chili.
En farfouillant sur internet, on peut tomber sur cette description assez complète du concept d’animitas.
D’après nos sommaires recherches, on peut aussi traduire Animitas par petite âme. De plus, ce serait un terme qui s’apparente au concept de l’animisme, soit « la croyance en un esprit, une force vitale, qui anime les êtres vivants, les objets, mais aussi les éléments naturels, comme les pierres ou le vent, ainsi qu’en des génies protecteurs. »»
Bref, le titre nous a bien intriguées et nos recherches ont certainement apporté une nouvelle compréhension de l’œuvre. Tout comme notre micro-analyse de la couverture qui nous semblait bien collée au contenu, contrairement à la quatrième de couverture que nous avons trouvé un peu trompeuse.
Il n’en reste pas moins que Animitas a fait l’unanimité du groupe malgré la lourdeur occasionnelle du récit qui faisait un peu ombre au mois de novembre, déjà gris, qui nous affectait toutes un peu. Les breuvages chauds, les discussions et les rires ont vite su nous sortir de la grisaille.
C’est avec, entre les mains, Les désirs amoureux de Marie Demers que nous sommes reparties, sachant que nous nous reverrons, pour la dernière séance, au café Zoha pour se plonger dans ce livre qui, une fois de plus, nous transportera en Amérique du sud… de quoi réchauffer la température extérieure.