« Grégory Lemay raconte la solitude des villes. Il montre la laideur grimée, mais aussi la beauté sans fard de ses personnages. Il sait s’approcher d’eux, de leurs blessures profondes avec la pudeur que donne parfois la légèreté » – Quatrième de couverture
Rarement ai-je trouvé qu’un quatrième de couverture mettait le doigt si aisément sur l’essence d’un roman.
Ce roman n’est pas long, 165 pages et pourtant, il m’en a pris que quelques unes avant de m’adapter au rythme de l’écriture, au style de narration et à l’entrecroisement entre les trois récits. Ces trois récits sont ceux de Geoffroy, Christèle et un Je narré qui se distingue par l’italique.
Geoffroy et Christèle sont un couple offrant des performances sexuelles à leurs clients, à domicile. Le Je habite dans le sous-sol de sa mamie, il est alcoolique, il cherche dans les ébats du couple quelque chose de plus qu’une performance et cherche de manière obsessive à trouver celui qui a tué les chats de sa mamie. Chacun des personnages est quelque peu difficile à cerner et c’est bien ainsi, le but du roman n’étant pas de nous offrir une incursion totale dans la vie de chacun d’eux .
Les modèles de l’amour offrent des portraits dysfonctionnels, des portraits entachés par le besoin d’attention, le viol, l’obsession, les maux de l’amour. Ces portraits restent tout de même beaux à observer, on y trouve tous quelque chose. Chacun des personnages nous est présenté avec un bagage qu’il ne débale jamais tout-à-fait, seulement que des brides ici et là. Le lecteur se trouve, un peu comme les clients de Christèle et Goeffroy, à ne pouvoir que regarder, et ce, sans chercher à s’immiscer, sans demander plus que ce qui est donné.
J’ai trouvé que l’écriture de Grégory Lemay jouait dans les subtilités sans être dans les non-dits. Son écriture effleure tout en laissant une trace et est bien moulée au type d’expérience que vit le lecteur en lisant Les modèles de l’amour.
Pour moi, une scène en particulier vient décrire toute la relation des personnages, toutes les dysfonctions qu’on retrouve dans Les modèles de l’amour que nous présente l’auteur, toute la solitude de chacun d’eux et même la petite étincelle d’amour qui brille pas fort et qui brille mal, mais qui est là…
C’est le seul moment où ce type de structure «scénario» est utilisé… c’est un copié-collé de ce qu’est le modèle de base en pornographie, mais à la fin, on retrouve une scène appelée discussion. Tout ça m’a frappée parce que Goeffroy et Christèle offrent une performance qu’on pourrait qualifier de «porno en live», mais à travers tout ça, à travers le show qu’ils offrent, il y a un peu de vrai, un peu d’amour, d’attachement… et de discussions. Je trouve que toute la structure du roman est un peu ainsi. Il y a les solitudes, les lourds passés, les problèmes et les dysfonctions, mais il reste toujours cette étincelle… ces «discussions» qui font toute la différence, qui offrent une distinction, ou plutôt un pont entre les performances et l’amour.



