Cet automne, nous avons reçu un communiqué de presse de Québec Amérique annonçant la traduction française d’un roman manitobain ayant eu énormément de succès depuis sa parution. Il s’agissait de Ligne brisée de Katherena Vermette, la version française de The break, traduit par nul autre que Mélissa Verreault. J’ai tout de suite eu envie de découvrir ce roman. On en parlait comme d’un incontournable et les thèmes ont, d’emblée, suscité mon intérêt.
Il s’agit d’un roman traitant de la violence que subissent les femmes autochtones. C’est un roman choral qui suit plusieurs femmes toutes connectées de différentes manières, ces femmes sont de différentes générations, mais elles ont en commun de subir du racisme systémique. Elles s’unissent, se soutiennent, se séparent, s’éloignent, se révoltent, portent en elles des noirceurs, mais malgré tout, elles sont soudées.
L’histoire débute avec le viol d’une jeune fille de 13 ans auquel assiste, par sa fenêtre, sans le vouloir, une jeune mère tenant son enfant dans ses bras. Dès les premières pages, on se sent impliqué dans l’histoire, on veut savoir ce qui est arrivé à la jeune Emily.
Écrit comme un thriller, je suis rapidement rentrée dans le roman. Non seulement parce que j’étais révoltée par l’événement déclencheur du roman, le viol de la jeune fille, mais parce que je tenais à connaitre le déroulement de l’enquête du policier. Au fil des pages, ce n’est plus tant de savoir qui a violé Emily que de savoir de quelle manière elle s’en sortira, de quelle façon, le soutien se créera à son chevet, avec les femmes qui l’entourent.
La narration change au fil des chapitres, on suit une dizaine de femmes et un seul homme, le policier. Ces changements de narration nous permettent d’en savoir plus sur ce qui est arrivé cette nuit-là, mais aussi à nous faire découvrir les personnages de l’histoire sous différents regards et points de vue. J’aime bien les romans choraux et surtout, dans ce genre de contexte, car on arrive à se placer comme observatrice des événements et qu’on se met, nous-mêmes, à analyser et saisir le récit qui se place devant nos yeux. La langue est crue et brute, très orale. On arrive rapidement à saisir l’essence des personnages, de leur âge comme de leur intériorité par le langage.
Or, ce qui ressort le plus de ce roman, selon moi, c’est la connexion entre les femmes, leur entraide, leurs passés qui les hantent et qui forgent leur personnalité. J’ai particulièrement aimé la place que prenait la grand-mère, le lien qu’elle était pour les autres femmes de la famille. C’est un touchant récit intergénérationnel où l’on suit plusieurs femmes, toutes reliées par le racisme systémique qu’elles subissent en étant autochtones, mais surtout par leurs liens familiaux solides.
Vendu à plus de 50 000 exemplaires, ce roman en est un difficile, par la réalité qu’il dévoile, qu’il met en scène, mais cette représentation est totalement nécessaire. C’est aberrant ce silence canadien sur les violences sexuelles subies par les autochtones. À ce sujet, il faut absolument lire Soeur volées d’Emmanuelle Walter.
Bref, il m’est rare de lire des romans canadiens, encore moins du Manitoba, alors j’étais plus qu’heureuse de découvrir cette plume. Katherena Vermette a énormément de talent pour créer des personnages féminins forts et multidimensionnels. Je le recommande sans hésiter.
Avez-vous d’autres romans manitobains à me conseiller?
Le Fil Rouge tient à remercier les Éditions Québec-Amérique pour le service de presse.