Littérature étrangère
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Les mille talents d’Eurídice Gusmão: l’histoire d’une femme invisible

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Dès que le soleil a commencé à poindre le bout de son nez et que le vent froid a enfin laissé sa place à un peu de chaleur, j’ai eu une envie pressante de dénicher un livre que je pourrais lire au parc. N’ayant pas en tête un titre ou un-e auteur-e en particulier, je me suis tout de même rendue à la Bibliothèque et me suis mise à lire les quatrièmes de couverture dans la section des nouveautés. Mes yeux se sont arrêtés sur quelques bouquins dont celui de Martha Batalha, auteure brésilienne qui a connu un vif succès dans son pays natal pour son premier roman Les mille talents d’Eurídice Gusmão. Sa couverture aux couleurs flamboyantes et festives donnait le ton à mon besoin de légèreté, de lumière et de chaleur réconfortante. Par contre, ce sont surtout les quelques lignes rédigées en majuscules qui m’ont interpellée, si bien que j’ai entrepris d’en faire la lecture:

«  L’histoire d’Eurídice Gusmão, ça pourrait être la vôtre, ou la mienne. Celle de toutes les femmes à qui on explique qu’elles ne doivent pas trop penser et qui choisissent de faire autrement… ».

L’avenir tout tracé d’Eurídice

L’histoire d’Eurídice se déroule à Rio de Janeiro dans les années 1940 à 1960. Cette femme au foyer qui a toujours voulu faire autre chose que ce qui lui était destiné constate que ses journées se résument principalement à préparer les repas de ses deux enfants et de son mari Antenor et à attendre leur retour à la maison. Toute jeune, son talent pour la flûte lui promettait un tout autre avenir, mais le refus catégorique de ses parents et la fugue de Guida, sa sœur aînée, ont pesé dans la balance, laissant ainsi peu de place à ses désirs à elle. Lorsque Guida s’est secrètement envolée avec Marcos par amour pour lui, Eurídice a cru bon d’éviter d’autres déceptions à son père. Elle est alors devenue ce que l’on attendait d’elle.

Mariée et étouffée par l’ennui, elle trouve un peu de réconfort dans la création de recettes de cuisine, dans la couture en offrant ses services au voisinage et, finalement, dans la littérature, attirant les regards désapprobateurs de tout le quartier. Une femme qui lit et qui écrit!

« Qui était-elle pour lire des auteurs compliqués et écrire autre chose que des recettes de pâtisserie? […] Tant d’arrogance de la part d’Eurídice ne pouvait s’expliquer que par la folie. » p. 224.

Bien qu’elle réussisse haut la main tout ce qu’elle entreprend, son mari fait preuve d’une grande indifférence à l’égard de ses projets lui rappelant ainsi son unique devoir : se consacrer à sa propre famille, ses enfants et lui plutôt qu’à de quelconques lubies.

Le portrait d’une société

Au-delà de l’histoire d’Eurídice et de Guida, nous avons accès à celle des autres personnages qui les côtoient de près ou de loin et même à celle de leurs ancêtres. Si au départ ces digressions m’ont dérangée dans ma lecture, ayant l’impression de perdre le fil, ce choix d’écriture s’est peu à peu justifié à la lecture du texte, car il permet d’offrir une vision de la société dans laquelle vivent les deux sœurs et de mieux comprendre l’attitude et les comportements de ces personnages envers elles.

Ce roman insiste sur cette liberté constamment brimée et parvient à faire le portrait de ce qu’ont vécu de nombreuses femmes. Les talents d’Eurídice – ses mille talents! – ne sont jamais appréciés à leur juste valeur puisque ses élans créateurs sont sans cesse freinés par les membres de sa famille et, plus largement, par le monde qui l’entoure. Le caractère parfois humoristique et ironique ajoute un peu de légèreté sans toutefois perdre de vue la condition difficile de la femme à cette époque. L’égalité entre les hommes et les femmes est d’ailleurs un sujet qui demeure toujours d’actualité!

Des femmes résilientes

Malgré leurs chemins pavés d’embûches, Eurídice et sa sœur – qui a dû élever seule son fils depuis que son mari l’a abandonnée – , ne baissent jamais les bras même si certains moments sont plus difficiles que d’autres. Eurídice trouve toujours le moyen de s’épanouir et de laisser place à sa créativité. Un projet en remplace toujours un autre!

J’ai trouvé ces femmes inspirantes parce qu’elles sont fortes et audacieuses, voire acharnées. Dès les premières pages, un sentiment de solidarité m’a envahie et m’a suivie tout au long de ma lecture. Le milieu dans lequel elles baignent n’a rien à joyeux, mais leur optimisme est plus que contagieux. Elles m’ont donné envie de faire ce que j’aime même si pour y arriver ce ne sera pas toujours facile!

Connaissez-vous d’autres œuvres de littérature étrangère dans lesquelles des personnages féminins réussissent tant bien que mal à s’épanouir dans une société contraignante ?

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