«LE VIOL EST UN INTERMINABLE SILENCE DUQUEL IL NE RESTE QUE DE LA CHAIR QUI CRIE.»
Vous avez peut-être vu ce petit livre dernièrement. Il est assez dur à manquer avec sa couverture jaune highlighter et son titre intriguant: «Mettre la hache: Slam western sur l’inceste». Pattie O’Green: retenez ce nom et espérez en entendre parler encore longtemps.
Les Éditions Remue-Ménage m’étonnent de plus en plus avec leurs dernières publications qui s’inscrivent fortement dans le paysage féministe québécois et soulèvent des questions nécessaires sous des témoignages parfois douloureux. Pattie O’Green a été victime d’inceste, tout comme sa soeur, et tente maintenant de panser les blessures et d’exorciser tout ce qui a pu être engendré par ces actes destructeurs. Comment se définir maintenant à l’âge adulte, quand notre corps ne nous a jamais appartenu et avec un choc post-traumatique? La jeune femme l’a d’abord fait sur un blogue (attention un peu à vos yeux!), en empruntant ce pseudonyme de Pattie O’Green, pour ensuite refondre le tout dans ce petit livre grand comme l’univers.
Y’a un (genre de) problème par contre avec Mettre la hache. J’ai vraiment envie de vous citer l’entièreté de tout ce qui se passe là-dedans pour que vous puissiez saisir. Saisir que c’est bien écrit, que c’est fort, que c’est ironique par moments, qu’on rit (jaune) un peu, qu’on sacre beaucoup. Saisir que l’acte d’inceste est avant-tout un acte de manipulation, de là son expression «violeur doux» tant utilisée, surtout pour montrer à quel point ça ne fait aucun sens, un «viol doux».
Alors qu’est-ce qui reste à cette petite ? Saisir la hache.
Saisir la hache pour la mettre dans le doute: ce doute dont sont victimes tant de VICTIMES d’inceste qui n’osent pas dénoncer, de peur de ne pas être prises au sérieux, de peur de regretter de l’avoir fait par la suite. «Il faut mettre la hache dans le doute parce qu’on pense que le fait de croire les victimes, ça compromet notre belle justice, comme si on allait conséquemment user de malice.»
Saisir la hache pour la mettre dans la prudence: «Si l’on veut que les histoires sortent des cercles d’initiées, que les fillettes cessent de se faire violer et que l’inceste arrête de «couler dans le sang de l’humanité» (Jacob Burckhardt), il faut nous laisser parler sans nous mettre sur le banc des accusées.» Ça dit tout.
Saisir la hache pour la mettre dans la convenance: parce que la convenance n’a pas sa place dans les témoignages de ce type. «[…] parce que l’humain peut exprimer l’indicible de toutes les manières possibles.»
Aujourd’hui, j’avais envie de mettre en avant les mots de Pattie O’Green parce que ce sont les seuls qui valent la peine d’être lus. Alors, la prochaine fois que vous verrez le petit livre jaune, achetez-le. Lisez-le. Faites-en un film. Brodez des mouchoirs avec de petites haches dessus. Peu importe, mais surtout ne restez pas indifférents.
Mettre la hache : Slam western sur l’inceste, Pattie O’Green. Les Éditions du Remue-Ménage, 2015. 125 pages. Dessins de Delphine Delas.
Je l’ai acheté il y a deux semaines et j’ai tellement hâte de le lire!
Aussi, je crois que ta chronique pourrait s’inscrire dans la chronique « Écrire l’indicible » sur le blogue 🙂
J’aimeJ’aime
Ping : Allez, on va danser au bal des absentes! | Le fil rouge
Ping : Le défi #Lirelesabsentes : pour faire rayonner la littérature écrite par des femmes | Le fil rouge