Au-delà des livres
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« Assommez-moi quelqu’un » ou la chronique d’une fille (un peu trop) occupée

« Assommez-moi quelqu’un », c’est ce que je me disais hier soir, alors que je me suis retrouvée couchée à 8 h 30 dans mon lit à cause d’un mal de tête d’enfer, et qu’à ce moment-là, mon cerveau n’arrivait même pas à se relaxer trois secondes parce que je pensais à trop d’affaires. Pendant trois heures, je me suis tournée et retournée dans mon lit sans pouvoir avoir la paix. Et s’il n’y avait eu que ça! Le problème, c’est que ce n’était pas la première fois que ça m’arrivait dans un temps rapproché, et surtout, le problème, c’est qu’il y avait un méchant problème quelque part, dans ma vie, et que c’est hier, la tête dans mon oreiller à me lamenter de douleur pendant des heures, que je me suis avouée vaincue.

Après une gigantesque semaine à travailler tous les jours et à faire des millions d’affaires tous les soirs, je venais de passer une journée de samedi de congé à faire la dernière correction pour un texte dont je m’occupais de la révision pour une revue universitaire, puis à écrire des tas de courriels concernant engagements et possibles bourses. Puis, j’ai planché sur une proposition pour un appel de texte et sur l’élaboration d’un plan pour un article. Ensuite, sentant le mal de tête arriver tranquillement, j’ai lâché mon ordi, suis allée planifier ma semaine avec mon agenda en essayant de me convaincre que j’allais arriver à tout faire, fais du ménage et fais cuire une trentaine de pommes pour en faire de la compote. Je me suis faite à souper, puis j’ai essayé de me relaxer en allant lire le dernier Harry Potter… BZRKKTWZZRX… problème de connexion de mon cerveau. Erreur. J’atterris dans mon lit le ventre en premier, la tête qui cogne comme un marteau et j’essaie de dormir. Mais je n’y arrive pas.

S’il y a bien une chose que j’ai apprise de mon été, c’est que je ne peux pas tout faire. Et surtout, non, je ne peux pas travailler quarante heures par semaine dans une job qui m’épuise, tout en étant capable de faire un rendement scolaire équivalent à du temps plein pour ma maîtrise, tout en préparant deux articles à la publication, faire partie de deux comités de rédaction, écrire des articles pour un blogue, voir mes amis et entretenir mes relations, lire pour le plaisir, faire de la cuisine en prévision de l’automne, m’entraîner pour un demi-marathon ET garder une vie saine sans exploser. Le pire? C’est que je n’ai même pas eu de vacances depuis la fin de ma session passée, et donc, que je suis non seulement fatiguée en permanence depuis le mois de mai, mais que je suis parfois sur le bord de péter une coche tellement je n’en peux plus de ce rythme un peu fou.

Cela dit, j’ai eu de mauvaises passes et de meilleures. Durant le mois de juillet, j’ai réussi à avoir un « beat » qui marchait assez bien : des semaines pas trop chargées, des week-ends reposants et pas trop occupés. Ces dernières semaines, j’étais aussi pas mal en forme.

Mais j’ai aussi eu des semaines où je me réveillais avec des maux de tête même le MATIN. Et où je m’effondrais, épuisée, à la fin de la semaine, en pleurant. Ou même des semaines où je me levais très tôt et où j’allais m’installer à l’UQAM vers 7 h le matin, avant ma job, pour pouvoir avancer mes échéances un peu. Et bien sûr, j’étais nécessairement crevée le soir à mon retour chez moi.

Bref, il y a forcément un problème, on s’entend. Et je viens d’abdiquer : ce n’est pas moi qui n’arrive pas à tout faire, c’est juste que je fais pas mal beaucoup d’affaires en même temps. Et qu’il est hors de question que ça continue indéfiniment de cette façon.

Hier, lors de la journée fatidique, j’ai reçu de bonnes nouvelles. Probablement un contrat d’auxiliaire de recherche (mon rêve depuis un an!) et la possibilité de postuler pour une bourse intéressante. Puis, un tas de choses tout autant potentiellement intéressantes pour l’an prochain qui vont nécessiter plusieurs (vraiment PLUSIEURS) heures de recherche et de formulaires sur internet. Je suis follement heureuse, mais en même temps, je crois que mon corps, hier, a fait CRAC. Il a paniqué. Il a dit : « Mmm… non, je ne crois pas que ce soit possible. » C’était la goutte qui a fait renverser le vase. Juste l’idée de devoir rajouter encore une couche de choses à faire, quelles qu’elles soient, lui était angoissant. Et pendant que moi, hier, j’ai dit : « YÉÉ! Wow, pleins de possibilités! Que de belles alternatives pour mes études! », mon corps, à ce même moment, a dit : « CRSEWX…WWTTB…BTRW… » Erreur de connexion. Too much. CRASH DOWN.

Bien sûr, beaucoup de gens de mon entourage me regardaient aller avec suspicion. On m’a dit de faire attention, de travailler moins, de prendre au moins une semaine de vacances. En même temps, je ne me suis pas bonnement pitchée là-dedans de manière inconsciente en attendant le crash! Oui oui, j’étais consciente de ce que je faisais, et je le faisais pareil. Pourquoi, me demanderez-vous alors?

Et bien, cet été, j’ai surtout eu une gigantesque révélation. Ça fait des années que je travaille à temps partiel en même temps que d’être aux études, que je travaille tout l’été, que je mène plusieurs projets de front. Mais, jusqu’à présent, la job est restée un « à côté » qui me permettait de sortir, payer mon loyer, manger. Même l’été, j’arrivais à « dealer » avec mes autres activités. Mais cet été, j’ai eu l’impression que ma job était devenue ma vie. En travaillant à temps-plein-plein, alors que j’avais plusieurs projets en parallèle, j’ai eu l’impression de vendre mon âme au diable. C’est que cette job me siphonne à la fois mon temps et mon énergie, et que tout le reste de ma vie a pris le bord. Littéralement. Et pendant que j’étiquetais des crayons et des surligneurs, et que je passais les uns après les autres les clients à la caisse, tous les jours de toutes les semaines de tout mon été, et que je revenais à 19 h le soir chez moi pour n’avoir d’énergie que pour me faire à souper et presque rien d’autre, je me demandais ce que je faisais avec ma vie. Alors que je consacrais autant de temps à des trucs qui m’importaient peu, je n’avais plus d’énergie pour faire le reste, c’est-à-dire ce qui m’importait tellement. Et je me suis dit que ça n’avait juste pas de bon sens, surtout pas avec mes valeurs et avec ce qui était vraiment important pour moi d’accomplir.

Alors, je me suis battue! Pour me garder en vie intellectuellement et pour me garder passionnée, j’ai refusé de mettre mes études de côté, de ne pas m’impliquer partout quand c’était cool. Je ne voulais surtout pas que ce qui était censé être important dans ma vie perde de la valeur, et que ce que je devais faire devienne, par défaut, l’important, juste parce que c’était ça qui occupait littéralement toutes mes journées.

On s’entend quand même, je ne suis certainement pas la seule sur terre qui trouve que sa job l’ennuie et qu’elle lui prend tout son temps. Mais en même temps, quand on y pense, je crois qu’on a le pouvoir de changer ça, ou du moins, on a la possibilité de faire un choix. Cet été, cette révélation a fait en sorte que je me suis dit que je ferais tout, mais vraiment tout, pour pouvoir vivre de ce que j’aime, avoir une job dans mon domaine qui me fait triper vraiment. Car passer autant d’heures à travailler pour pouvoir gagner de quoi payer son loyer, mais sans en retirer du plaisir, c’est vivre constamment en stand-by de sa propre vie, c’est être en attente tous les jours du mois et de l’année, sans jamais vraiment avancer.

Je me suis donc réveillée ce matin, ai pris une grande respiration, et déjà le CRASH semblait moins pire. Mon corps a fini par dormir et moi, à reprendre des forces. Je me suis levée, et ai pris une décision. J’allais changer quelques affaires dans ma vie.

Dans l’impossibilité de quitter mon emploi maintenant (je me suis engagée pour un certain temps), et avec mon envie de plonger tête première dans mon nouveau contrat, j’ai décidé de continuer à jongler (encore) quelque temps avec un horaire surchargé. On ne peut pas tout quitter du jour au lendemain, quand même. J’allais faire de mon mieux tout en faisant attention à moi. J’étais donc prête à recommencer ma semaine (et j’ai même de la bouffe en avance!). Avec un peu d’organisation, je devrais tenir le coup, encore une fois. Le pire, c’est que je tiens toujours le coup. J’ai mis de côté certaines choses qui peuvent attendre, et ai trouvé quelques solutions temporaires pour d’autres.

Quand on est une fille comme moi, on passe par des hauts et des bas, on en fait plus qu’on en demande, toujours, mais on sait pourquoi. On fait les choses parce que ça nous tient à cœur, même si c’est parfois un peu intense dans notre horaire.

Mais j’avoue que j’ai quand même hâte à la fin septembre, histoire d’arrêter de travailler à temps-plein-plein, prendre des vacances, et enfin avoir un peu de temps pour respirer et… recommencer à plancher avec passion sur mes projets!

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Marion vit avec la peur constante de manquer de lecture depuis son tout jeune âge, ce qui l’amène trop souvent à surcharger de livres son pauvre dos. Étudiante au doctorat en littérature, elle est aussi passionnée par l’écriture, les voyages et les grandes randonnées. Plus il y a de pages à lire ou de kilomètres à parcourir, plus elle est heureuse. Rêveuse et idéaliste, elle carbure (un peu trop) aux défis, est végane le plus qu’elle peut, et ne pourrait pas vivre sans Harry Potter, le gâteau au chocolat et les carnets de notes. Elle est collaboratrice pour Le fil rouge depuis 2015.

2 Comments

  1. Oh wow, c’est comme si je lisais quelque chose que j’avais écrit! Ça fait du bien de savoir que je ne suis pas seule à être comme ça 🙂

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