Il n’est pas toujours facile de justifier mon choix d’aller faire un doctorat en sociologie. Certains pensent que ce n’est pas une «vraie science», d’autres ajoutent que les sociologues sont juste des «pelleteux de nuage», plusieurs croient que je n’arriverai pas à trouver un bon emploi stable dans mon domaine. Bref, toutes les raisons sont bonnes pour me décourager, pourtant quand je lis un livre comme celui d’Eva Illouz, je sais que j’ai pris la bonne décision en choisissant la sociologie. Avoir un regard sociologique, c’est se montrer curieux face à une situation, c’est une volonté de mieux comprendre les mécanismes et les constructions sociales, une meilleure compréhension de la société dans laquelle on évolue permet d’agir sur celle-ci.
Une meilleure compréhension de l’amour à l’époque contemporaine dans le monde occidental, voilà donc l’ambition de l’autrice. Si vous pensiez avoir affaire à un livre de «psycho-pop» pour vous aidez à gérer votre vie amoureuse, vous serez déçu. Par contre, si vous souhaitez mieux comprendre comment l’amour est socialement codifié aujourd’hui, vous serez renversé!
«L’ambition de ce livre a ainsi été de traiter les émotions -ou du moins l’amour romantique- comme Marx les marchandises, et de montrer qu’elles sont façonnées par les rapports sociaux, qu’elles ne circulent pas librement et sans contraintes, que leur magie est une magie sociale, et qu’elles contiennent et condensent les institutions de la modernité.» p. 439
Dans son livre, la sociologue remet en question nombre de nos perceptions sur l’amour, parmi lesquelles elle met en doute la peur de l’engagement des hommes, avançant plutôt que le besoin d’engagement n’arrive pas au même moment pour les hommes que pour les femmes. En effet, le fait que l’on construise le corps de la femme comme une unité définie par la chronologie, la fameuse horloge biologique, pousse les femmes à vouloir s’engager plus tôt, de peur de «passer date».
Eva Illouz est rapidement devenue ma référence pour analyser, comprendre et expliquer mes relations amoureuses comme celles des autres. Il est alors devenu évident que nous ne sommes pas entièrement responsables de nos déceptions amoureuses. La structure sociale dans laquelle nous évoluons, les codes culturels que nous suivons, déterminent en partie la façon dont se déroulent nos péripéties amoureuses.
C’est pour cette raison que l’ouvrage d’Illouz est sans aucun doute un livre qui fait du bien. Au lieu de nous dire comment flirter, comment agir, quoi faire et ne pas faire pour que notre couple fonctionne, elle nous explique simplement comment il y a parfois un décalage entre nos attentes et la réalité. C’est cette connaissance qui fait du bien, qui nous donne le pouvoir d’agir sur notre vie. Votre vision de l’amour ne sera plus jamais la même!
Et vous, avez-vous parfois l’impression qu’il y a quelque chose hors de votre contrôle qui influence irrémédiablement votre vie?
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