Littérature québécoise
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Le pouvoir de l’imaginaire

Je ne suis pas de ceux qui ont un grand génie de Sévryna Lupien est le dernier roman à paraître chez Stanké et le premier de l’auteure. Cette jeune libraire, également artiste multidisciplinaire, signe un roman drôle et touchant. Auguste est le personnage principal et le narrateur du récit. Dans la lignée des voix narratives de Room, C’est pas moi je le jure, To Kill a Mockingbird ou encore le magnifique La vie devant soi du côté des grands classiques, on a affaire à un narrateur à la voix candide de l’enfance. Cette candeur lui donne aussi une énorme franchise qui lui permet de poser un regard très juste sur le monde, malgré (ou grâce à?) sa grande naïveté : « Je ne suis peut-être pas de ceux qui ont un grand génie, mais je sais que les gens bien, c’est important pour notre existence. » (p. 138) Et les gens bien, Auguste aura la chance d’en rencontrer!

Orphelin, Auguste vit au centre Saint-Marie-des-Cieux où des religieuses s’occupent de lui. Il en a marre d’être dans cet endroit sans vie, alors il planifie et réussit son évasion. On le suit au fil de ses rencontres, parfois hasardeuses, parfois gourmandes (oh le plaisir de manger son premier croissant!), souvent attendrissantes, qui le mèneront à vivre dans un endroit qui ressemble beaucoup à Central Park avec d’autres itinérants plus âgés : Georges et Marie. Ensemble le trio d’infortune forme un « organisme » qui s’entraide et s’aime. Mais malgré sa chance dans la malchance, au fur et à mesure que l’histoire avance, Auguste se rend bien compte que « c’est compliqué de se gérer tout seul » (p. 152).

Être naïf, Auguste ne cesse de multiplier les idées saugrenues, qui font parfois rire et toujours sourire. Une de mes préférées : « Une fois, la sœur supérieure m’a surpris à faire mes devoirs sous le lit avec ma main gauche et j’ai eu droit à vingt coups de règle en bois sur la main. Ce jour-là, j’ai compris que Dieu était droitier et qu’à cause de ça nous devions tous l’être. » (p. 61) Par ses notions un peu rocambolesques, Auguste finit par charmer tous ceux qu’il croise, et surtout le lecteur.

L’idée est venue à Lupien d’un coup. Une sorte d’épiphanie. « C’est le titre qui est venu en premier. C’était en 2010, je crois. J’étais dans le grand ménage de mon atelier et cette phrase m’est venue en tête. J’ai ouvert l’ordinateur pour la noter. J’ai arrêté d’écrire cinq jours plus tard, à la fin de la troisième partie. J’ai enregistré le tout et je me suis relue. Ce fut une longue illumination spontanée en quelque sorte! » a expliqué Lupien dans un entretien avec Les libraires. Ce n’est que quelques années plus tard qu’elle y est revenue pour le lire à nouveau et ajouter la quatrième partie tellement surprenante.

L’écriture est très rythmée; les phrases s’enchaînent rapidement. En quatre parties avec de nombreux chapitres très courts, le roman se dévore quasiment d’un coup. Mais, en même temps, la voix d’Auguste est attachante et c’est bon de prendre son temps pour s’émerveiller avec lui devant ses découvertes anodines. La simplicité de la narration a été pour moi un grand coup de cœur. Vraiment, l’écriture est un plaisir qui vaut le coup à lui seul.

Seul bémol… je ne sais pas vraiment si la quatrième partie « surprise » m’a vraiment convaincue. Mais je ne peux pas vous en dire plus! Donc, ce n’est pas tellement un bémol, car ça vous invite quand même à lire le roman et à revenir me dire ce que vous en avez pensé ici-bas! Il est disponible en librairie depuis le 15 février.


Le fil rouge remercie les éditions Stanké pour le service de presse.
Lupien, Sévryna. Je ne suis pas de ceux qui ont un grand génie, Montréal, Stanké, 2017, 179 p.

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