Les hashtags concernant les livres et la lecture gagnent en popularité sur instagram : #lefilrougelit, #littqc, #lecturedumoment, #liretv, #instalecture, #bookstagram, #bookish, etc. Une communauté de lectrices et de lecteurs est bien présente afin d’y partager ses coups de cœur littéraires ou simplement afficher ses lectures pour en discuter avec d’autres amoureux des mots. À la mi-mars, j’ai fait un appel de textes sur instagram :
Je suis à la recherche d’utilisateurs instagram qui aimeraient participer à un article sur le blogue littéraire Le fil rouge. Le concept est simple : j’aimerais que vous nous parliez d’une lecture qui fut salvatrice pour vous à un certain moment de votre vie, ou qui vous a fait du bien, tout simplement.
Huit grands lecteurs se sont prêtés au jeu :
Delphine Larose (@delphiii22), 26 ans, Muséologue
À l’aube de mes 21 ans, j’ai décidé de partir pour la première fois de ma vie seule en voyage, à l’autre bout de l’océan. Je me suis donc envolée vers la Grande-Bretagne, où j’allais passer trois semaines à visiter les musées et m’imprégner de la culture anglaise. Les premiers jours ont été particulièrement difficiles; en plus du décalage horaire, je vivais un genre de peine d’amour et la fuite vers l’Angleterre ne m’aidait pas nécessairement à m’en remettre. Dans ma valise, j’avais amené L’amour dure trois ans de Frédéric Beigbeder, que mon amie m’avait prêté juste avant mon départ. J’ai passé au travers du roman en moins de quelques heures, n’étant pas capable de déposer ma lecture. Beigbeder était la claque au visage que j’avais besoin pour continuer, pour passer un des plus beaux voyages de ma vie. Même encore, je n’ai jamais trouvé un livre qui m’a autant bouleversée que celui-ci. Il existe tellement de passages de « L’amour dure trois ans » que j’aurais aimé avoir écrit, et je me console en les relisant régulièrement, pour assimiler chaque mot, chaque syllabe, chaque marque de ponctuation. La poésie brutale et moderne de Beigbeder représente probablement ce côté inconnu de moi-même, bien enfoui quelque part au fond de mes tripes.
Amélie Lapierre (@atheroc), 26 ans, présentement en congé de maternité
Il y a 6 ans, j’ai perdu mon père. Il avait le cancer. J’ai toujours été très proche de lui et nous avions beaucoup d’intérêts communs comme la pêche et la musique. Mais surtout la musique. Encore aujourd’hui, il y a une multitude de chansons qui représente des moments importants de ma vie. Récemment, j’ai lu le livre Un mixtape en héritage de Marie-Lyse Paquin. Ce court roman a été pour moi un genre de révélation. Le livre relate les moments importants d’une vie à travers des chansons. Même si le départ de mon père remonte déjà à un certain temps, la lecture de ce livre a mis un baume sur ma peine. Il m’a permis de me replonger dans mes souvenirs, les bons comme les mauvais, et pendant le temps qu’il en faut pour lire 136 pages, je me suis sentie près de mon père.
Jean-François Peereman dit Georges D. (@legeorgesd), 44 ans, fonctionnaire à tendance humoriste
« Le corps » de Stephen King dans Différentes saisons
J’ai découvert Stephen King par le biais d’un film : Stand By Me, de Rob Reiner. Intrigué par la citation au générique d’après la nouvelle de…, je me renseigne chez un libraire (eh oui, je vous parle d’un temps où Internet n’existait même pas) et me procure le recueil de nouvelles Différentes saisons. Quatre novellas constituent le livre avec, ce qui deviendra la marque de fabrique de King, des préfaces sur la conception desdites histoires. Une sorte de making of littéraire. Intéressant quand vous vous intéressez vous-même à l’écriture.
Cette lecture a été un choc. Je suis tombé amoureux du style Kingien. De son efficacité. De sa faculté à explorer la face sombre de la psyché humaine. J’ai dévoré l’œuvre du maître de l’horreur. Et je continue de le lire. Car je m’y retrouve. Je me sens proche de Carrie, des gamins dans ÇA, d’Annie Cunningham dans Christine. J’ai même fait deux travaux de fin d’études sur l’écrivain. Pour moi, Stephen King est l’équivalent d’un coup de foudre.
Une évidence.
Gaëlle Graton (@gaellegraton), 20 ans
J’aurais pu faire de n’importe quel essai féministe l’élu de mon cœur. En choisir un aurait été une tâche ingrate, voire incomplète. J’aurais tenté de mesurer la profondeur de la marque qu’ils ont singulièrement laissée sur ma vie, la liste aurait très peu maigri et ma culpabilité envers les écartés, elle, aurait grandi. Un tue-monde, je vous dis. Je salue et remercie alors celles qui ne sont pas demeurées engourdies par le bruit du gong de Kim qui attendait nos retours et qui sont gracieusement parvenues à faire le choix d’un essai.
Mon mea culpa terminé, je me suis rapidement rappelé l’importance du roman Le comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas lu en troisième secondaire. Réflexion faite, cette impressionnante brique littéraire aura eu le mérite de remplir ma jauge de confiance en moi plus qu’elle m’aura été une lecture jubilatoire. Je ne me reconnaissais dans aucun personnage – masculin –, mais je dois admettre que tenir ce classique entre mes doigts, laisser mes yeux filer sur ces mots inconnus fut en soi salutaire pour l’adolescente que j’étais : celle qui malgré toute sa bonne volonté s’avouait bien loin d’être performante dans ses cours de français.
Il y a deux ans, quelques semaines après que l’été ait cessé de jouer à cache-cache avec la neige, j’ai empoigné Le rayonnement des corps noirs né de nulle autre que Kim Doré. J’ai lu, relu et j’ai fondu avec les restants de scepticisme de ceux qui flânaient, avenue Mont-Royal, convaincus qu’une autre tempête tirerait la langue à l’asphalte. Cette véritable œuvre, entière et terrassante que je visite sans cesse, travaille ardemment sur mes émotions. Je ne compte plus les heures supplémentaires. La beauté des images minutieusement créées par la poète me bouleverse et me rappelle cet amour pour la littérature. C’est sans doute dans mon inaptitude à expliquer adéquatement l’importance de ce recueil que se campe toute sa puissance. Et je resterai toujours fascinée, admirative même vis-à-vis l’art de celles et ceux qui écrivent. Donner l’impression, devant une infinité de mots possibles, que ceux choisis semblent préférables tellement ils font oublier tous ceux qui ne figurent pas sur papier, mérite courbettes et révérences.
Je viens juste d’acheter Différentes saisons! Yeah 🙂
Je vais probablement le lire pendant mon roadtrip dans le Maine cet été… quand je vais aller creeper la maison de Stephen King.
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