Samedi le 21 octobre.
C’est au café Chez l’Éditeur, annexé aux Éditions Québec Amérique et aux Éditions Cardinal, qu’on se retrouve pour une deuxième rencontre, en ce beau samedi matin d’automne.
Notre lecture du mois : Manikanetish de Naomi Fontaine.
Une enseignante de français en poste sur une réserve indienne de la Côte-Nord raconte son univers, celui de ses élèves qui cherchent à se prendre en main. Autochtone, elle tentera tout pour les sauver du désespoir, même se lancer en théâtre avec eux. Dans ces voix, regards et paysages se détachent la lutte et l’espoir.
Alors, avez-vous aimé votre lecture?
Tous et toutes s’entendent pour dire que oui; que c’était beau, doux et plein de vulnérabilité. Que les moments choisis par l’auteure sont ceux qui sont portés d’une certaine lumière, d’une belle humanité, d’une envie de partage. Par contre, certain.e.s trouvent aussi qu’il manque un peu de profondeur à l’œuvre. Que le roman aurait mérité quelques pages de plus pour être moins en surface.
Nous sommes donc vraiment entre deux réactions, devant tout le beau, le doux, la lumière et ce choix — qui nous semble conscient — de faire miroiter plus de beau que de drame et devant cette gradation des relations, qui est à la fois belle et peut-être trop facile par moment.
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Alors que certaines auraient voulu en savoir un peu plus sur la vie de la communauté et le quotidien des élèves, une question me vient en tête.
Mais est-ce que les auteur.e.s autochtones se doivent de raconter les réalités de leurs communautés?
C’est d’un « non » commun que les participant.e.s répondent. Pourtant, ce désir d’en savoir plus semble être présent; peut-être était-ce une attente un peu inconsciente, une simple curiosité?
La question identitaire
La question identitaire est bel et bien présente dans Manikanetish. On y retrouve un personnage entre deux chaises qui ne se sent pas entièrement lui-même ni dans la communauté qui l’a vu naître ni dans la ville qui l’a vu grandir et qui cherche à se faire une place quelque part entre les deux. Les participant.e.s ont trouvé qu’on ressentait bien, à travers les différents extraits, cette solitude et cette difficulté à se frayer une place. Yammi semble se sentir un peu comme le mouton noir, exclue à la fois de la communauté de professeurs et loin de la réalité des élèves.
« On est tous le mouton noir de quelqu’un. » Cette phrase, sortie tout bonnement de la bouche de Martine, pleine de vérité et drôle à la fois, nous a tous bien fait rire. Un peu comme à l’image du livre qui semble mettre l’accent sur les aspects positifs et la lumière plus que la noirceur (qui y est tout de même présente), ce sont ces petites interventions cocasses qui peuvent créer aussi toute la lumière dans nos propres rencontres.
Le style
Certain.e.s des participant.e.s ont l’impression qu’il y a, dans Manikanetish, une coupure plutôt évidente dans le style d’écriture. « Ça donne l’impression qu’elle a écrit le roman sur une longue période », dit l’un d’eux. En fait, c’est comme si on passait de la plume au propos. D’une écriture axée sur elle-même, travaillée, introspective, à une écriture qui met ensuite l’accent sur le propos, sur les élèves, sur les moments.
La place de l’enseignement
La place de l’enseignement est non négligeable dans le roman. Ayant parmi nous deux enseignantes, on ne peut — ni ne veut — éviter la question. Les deux s’accordent pour dire que la manière dont Yammi enseigne à ses élèves est pleine d’humanité, de compassion et d’un désir de compréhension; un enseignement humaniste qui rejoint nos deux participantes.
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Ce fut donc sur cette note que se termina notre rencontre. Comme toujours, on étira le temps, après la fin, pour jaser d’un peu tout, parler de nos lectures, mais aussi de la vie et, on doit l’avouer, un peu d’Occupation Double. Ah, que voulez-vous!
Notre collaboratrice Vanessa a d’ailleurs écrit un article au sujet de ce livre : Manikanetish, le retour d’une enseignante dans une école d’Uashat.
La prochaine fois, on se retrouve au magnifique Café les Oubliettes pour lire La dévoration des fées de Catherine Lalonde.