Étonnamment, cet article ne sera pas sur un livre de cuisine. Je sais bien qu’avec ce titre c’est ce que vous aviez pensé, mais cette critique et ce livre vous donneront l’eau à la bouche, c’est promis !
Célébrer le plaisir des sens
Treize à table est un collectif de nouvelles inspiré et dirigé par Chrystine Brouillet et Geneviève Lefebvre. Elles ont choisi d’attabler 11 de leurs collègues écrivain(es) pour nous partager leurs souvenirs entourant les plaisirs de la table. On nous parlera d’odeurs, de voyages, de descriptions ultra détaillées de recettes qui font rêver, de souvenirs intimes, d’histoires émouvantes ou inventées, et souvent, et surtout, on nous parlera de nourriture, bien évidemment. C’est à Michel Marc Bouchard, Rafaële Germain, Patrice Godin, Michel Jean, Samuel Larochelle, Geneviève Brouillette, François Lévesque, Annie L’Italien, Ian Manook, Michèle Plomer et finalement Erika Soucy qu’on a demandé de nous raconter ce que la table leur inspirait et croyez-moi, vous ne serez pas déçus.
Dans ce livre, on fait référence aux bonnes tables (ce resto qu’on se paye une fois dans sa vie), aux voyages qui remplissent la tête de souvenirs olfactifs et gustatifs (comment peut-on décrire une simple olive avec autant de détails ?), aux souvenirs de notre enfance (la nourriture de papa/maman, y a-t-il quelque chose de mieux?), ou simplement en nous racontant le plaisir partagé en dégustant un met qui nous plait avec quelqu’un qu’on aime ou qui nous inspire. Dans ces 13 nouvelles, on découvre tour à tour de courtes histoires bien émouvantes, surprenantes, qui porte parfois à la réflexion, mais surtout, on ne tombe jamais dans l’ennui. Dans certains cas, j’en aurais pris beaucoup plus ! Je crois que c’est la raison pour laquelle je ne me tanne pas de lire des recueils de nouvelles, et encore plus quand ils sont écrits par un collectif de différents auteurs. C’est comme avoir un petit bout de chacun d’entre eux au même endroit et si on en aime un plus que l’autre, comme ce fût mon cas dans ce livre, il nous reste simplement à découvrir le reste de son oeuvre par la suite. Une excellente façon de faire de belles découvertes !
La nourriture et moi
Je peux dire sans hésitation que j’adore manger, et ce, même si ça n’a pas toujours été le cas. L’odeur du pain frais ou du café fraîchement moulu ont un effet de bonheur instantané sur moi. Cependant rien, et je dis bien rien au monde, ne battra jamais le boeuf aux légumes de ma mère ou sa sauce à spaghetti; niveau mémoires olfactive et gustative, c’est tout simplement impossible d’y résister ! C’est sans doutes pour cette raison que j’ai été autant touchée par certaines histoires dans lesquelles je me suis totalement reconnue.
Afin de vous mettre en appétit (oh! le jeu de mot !) voici quelques extraits du collectif:
Dame de coeur, Dame de pic de Chrystine Brouillet:
«Voilà la poitrine de pigeonneau fumée et marinée au coeur d’un rose à peine plus soutenu
eque celui de la rhubarbe sur lequel on l’a couchée, la cuisse confite se dresse entre les quenelles d’abattis mixés avec du rhum et les morceaux de céleris rôtis glacés, ses feuilles apportent un soupçon d’amertume à ce plat qui m’émeut par ce savant mariage entre l’acidité pimpante du fruit et la viande à la chair boisée, la simplicité apparente de la sauce réduite au pigeonneau et le dosage exact du poivre cubèbe. (…) La perfection est de ce monde.»
Avouez que vous commencez à me comprendre un peu ?
Le temps des pommes de François Lévesque :
« Cuisiner, c’est ce que je préfère au monde. J’ai de surcroît un talent pour ça. Ce n’est pas vaniteux de le dire. Au contraire, ce serait de la fausse modestie de ne pas l’admettre. Si seulement ma mère m’entendait…»
Classique Caro: j’ai eu les yeux plein d’eau en lisant celle-là, la fin vous surprendra c’est certain.
Finalement, ma préférée, Le dernier, d’Annie L’italien:
«Ils sont tous là, nos deux enfants, la conjointe de notre fils et nos deux petits enfants. Je dis « tous » comme si une foule était à ma porte, sans doute parce que j’aurais aimé avoir une famille plus nombreuse. (…) Comment vas-tu maman ? Ça va, ça va. J’ai commencé à faire un ménage de garde de robe, je vais avoir tout un lot de sacs à donner. Ben voyons, t’es pas obligé de faire ça maintenant ! Laisse au corps le temps de refroidir ! (…)
Combien de fois ai-je essayé de lui faire comprendre que les plats qu’il cuisinait ne constituaient pas une preuve suffisante de son amour ? (…) Pour lui, préparer des gaufres à sa fille était l’équivalent de s’excuser pour l’avoir grondé trop fort la veille (…).
Bref, personne ne pleure sa mort, sauf moi. D’ailleurs les larmes reviennent lorsque je dépose les plats (qu’il a concocté avant de mourir) sur la table, accompagnés des notes imprimées sur des cartons. Je les plie avec soin, pour qu’elles tiennent bien, et j’invite tout le monde à me rejoindre…
« Aubergines Parmesan – Pour Marc-Antoine » – (…)
» Canard Laqué – Pour Mia » – (…) »
Ce que j’ai particulièrement aimé dans celle-là et pourquoi il s’agit de ma nouvelle préférée, c’est sans doute l’amour du père qu’on ressent alors que celui-ci était si maladroit de son vivant. Un amour qui pour lui passait simplement par les plats faits à sa femme et à ses enfants, et c’est si joliment raconté. Comme quoi exprimer son amour peut passer par différents moteurs, et la nourriture qu’on offre aux gens qu’on aime peut certainement en faire partie.
Dans l’ensemble, je dirais qu’il s’agit d’un très bon collectif de nouvelles, j’ai apprécié ma lecture de A à Z. Je vous suggère de ne pas le lire le ventre vide, ou alors accompagné de votre plat préféré, car il se pourrait que vous ayez envie d’abandonner votre lecture pour vous mettre à cuisiner !
Et vous, avez-vous de bons souvenirs liés à la nourriture, à un plat, à une odeur, lors d’un voyage ou autre ?
Hmmm~
Effectivement, j’ai faim à présent! Je dois absolument lire ce livre.
Pour moi, le meilleur souvenir de nourriture est l’épaule d’agneau à la sauce au miel et à la menthe de ma mère; ou alors les croissants chauds le matin, fait par mon grand-père. Rien de meilleur au monde pour moi…!
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