Littérature québécoise
Comment 1

Les choses brisées de Catherine Côté: écrire sur le banal et l’inconfort

Le fil rouge, le fil rouge lit, #Lefilrouge, #Lefilrougelit, Livres, lecture, bibliothérapie, les livres qui font du bien, littérature, Les choses brisées, Québec Amérique, La Shop, Catherine Côté, recueil de nouvelles, deuils, ruptures

Je me suis rendu compte que, depuis quelques années, à travers ma vie d’étudiante-adulte-active, je suis devenue très inconstante en ce qui concerne le temps que j’accorde à mes lectures personnelles. À certains moments, les livres s’enchaînent les uns après les autres à une vitesse folle, mais à d’autres, ils s’étirent en longueur pendant plusieurs semaines. Je passe aussi parfois des jours entiers sans lire, par manque de temps, ou d’autres fois, c’est l’envie qui n’y est pas (et alors, le même livre traîne sur ma table de chevet encore et encore, au point où parfois je ne me rappelle plus de ce dont il traite!).

D’autres fois, l’étirement de la lecture s’impose par le livre lui-même. C’est ce qui est arrivé avec Les choses brisées, un recueil de dix-huit très courtes nouvelles écrites par Catherine Côté. Le livre avait beau ne contenir que 134 pages, je l’ai traîné sur moi plusieurs semaines, lisant des bribes par-ci par-là à travers la fin de session, dans les transports en commun et pendant les moments de fin de soirée. Ce n’était absolument pas par ennui, je pense plutôt que l’essence même de ce recueil de nouvelles était de se lire davantage par petits bouts, du moins, c’est ce que j’ai ressenti. Finalement, il n’aurait pas pu y avoir meilleure lecture pour accompagner mes dernières semaines plutôt chargées.

De courtes nouvelles sans chute

Les nouvelles du recueil Les choses brisées sont très courtes, quelques pages tout au plus, et chacune d’entre elles se présente en quelque sorte comme un «moment», un «morceau». Souvent, les nouvelles racontent un évènement précis, une rencontre, un souvenir, une date, et elles n’ont pas nécessairement de chute finale – comme dans la forme classique de la nouvelle –, mais se terminent plutôt sans faire de vagues.

Plus souvent qu’autrement, les nouvelles racontent des moments d’insatisfaction, de douleur, d’insécurité, de malaise ou d’inconfort, des moments souvent banals, des scènes de la vie quotidienne, mais qui accrochent et dans lesquelles sont représentées des brisures, que ce soit entre les protagonistes et les autres – des amies, des hommes, des enfants – ou à l’intérieur d’elles-mêmes.

«Je voulais écrire sur des choses qui se brisent, c’est tout. Comme nous deux. Comme Étienne et moi. Comme mon corps. Comme ma tête. Je pensais que ça m’aiderait à les recoller. Ça n’a pas marché.» (p. 134)

Il y a quelque chose de particulier dans le fait que les protagonistes soient toutes des femmes effacées, utilisées, décalées, inquiètes, de celles qui font de mauvais choix et qui se vautrent dans des relations qu’elles savent insatisfaisantes, autour desquelles tournent des personnages à l’ego démesuré, manipulateurs, trop confiants, etc. L’autrice n’a pas peur de montrer le côté peu reluisant de ses héroïnes qui ont désespérément besoin de tendresse ou qui cherchent à trouver du contentement n’importe où. C’est ce que j’ai trouvé le plus intéressant à la lecture. Elle a pris soin d’illustrer ce que l’écriture, souvent, ne décrit pas et ces choses «brisées» en deviennent belles, parce qu’on s’y reconnaît, et qu’on a toutes et tous, dans notre vie, des moments «laids».

Une écriture de la brisure

Les nouvelles frappent parce qu’elles sont empreintes d’une profonde tristesse, tout comme d’une grande force. Et Catherine Côté ne se donne pas comme mission de transmettre l’espoir, au contraire. C’est surtout l’inévitable présence de ces brèches dans l’existence qui est mise en valeur. En ce sens, l’écriture décrit et dévoile les points de tension de la vie humaine. L’écriture est belle et s’écoule sans être encombrée, ce qui rend la lecture facile, fluide et agréable, malgré les sujets tristes et difficiles qui sont évoqués.

Ce recueil n’est peut-être pas le livre que vous emporterez sur la plage cet été, mais plutôt celui que vous lirez lors d’une journée grise de printemps, où la météo pluvieuse vous retiendra à l’intérieur. Il est le livre des jours tristes, mais dans lesquels l’écho des malheurs et des insécurités des protagonistes viendra peut-être apporter un certain réconfort.

Aimez-vous les recueils de nouvelles? Avez-vous des habitudes de lecture différentes lorsque vous en lisez?

Un commentaire

  1. Ping : Rencontre avec Catherine Côté, autrice du recueil de poésie Dans ta grande peau | Le fil rouge

Laisser un commentaire

Entrer les renseignements ci-dessous ou cliquer sur une icône pour ouvrir une session :

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s