Au-delà des livres
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Ma petite soeur est plus grande que moi : la fois où j’ai dit que c’était assez

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Je me rappelle de la fois où  j’ai cassé les lunettes de ma sœur en deux parce qu’elle ne voulait pas me donner d’oreiller. J’avais cinq ans , ses lunettes étaient neuves, mes parents avaient très peu d’argent , c’était la recette parfaite pour une bonne tape sur les fesses .

Je me rappelle de la fois où  ma sœur a mangé un de ces étranges S en styromousse rose (utilisé dans les colis postaux) parce que ma mère et moi avions dit , à haute voix , que ça ressemblait drôlement à une crevette .

Mais s’il y a une chose dont je ne me souviens pas, c’est la fois où j’ai dit à mes parents que c’était assez. J’avais douze ans, ma sœur était dans sa «  crise d’ado », elle n’était plus assez stimulée intellectuellement, il n’y avait pas de ressources adaptées à ses besoins dans ma ville, mes parents avaient la corde assez usée.

C’est pour ça et bien d’autres raisons qu’ils ont décidé d’envoyer ma sœur dans une école spécialisée, dans une autre ville.  Au début, la transition fut dure, surtout pour elle. Pendant longtemps , le terme famille d’accueil a résonné de façon bien péjorative dans ma tête. Le terme était associé avec DPJ, mauvaise situation familiale, parents irresponsables et tous les mauvais scénarios qu’on y attache .

Ça fait que j’ai longtemps ressenti un malaise en disant que ma sœur était en famille d’accueil, et ça , ça fait que j’ai souvent dit des choses comme «  elle habite avec une madame ,qui n’est pas ma mère, mais ce n’est pas une famille d’accueil, elle a sa vie , elle est partie de la maison comme si c’était  pour aller au cégep, elle vit avec d’autres handicapés, mais pas plein là, c’est pas un centre , elle a sa vie ( bien oui, deux fois) , plus de chums que moi ….. » tout ça, dans l’espace de quelques secondes ,question d’enchainer les justifications , question que personne n’ait le temps de redire quelque chose.

On dirait que, dans la gêne que ça me causait à moi , je n’étais pas capable de réaliser qu’en fait, c’est probablement la meilleure chose qui ait pu lui arriver  et que, si les autres ne sont pas capables de comprendre, ce n’est pas mon problème. Elle est heureuse , elle a sa propre  vie , peu importe ce que famille d’accueil peu bien vouloir dire dans la  tête des autres , dans la sienne ç’est bien positif .

Crédit photo : pinterest

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Curieuse depuis toujours, Marjorie s’intéresse à un peu tout, avec un penchant marqué pour les mots, le féminisme, les phénomènes de culture populaire et les mystères de la vie. Elle est bachelière en littérature et cofondatrice du Fil rouge, à travers duquel elle tente de faire son petit bout de chemin, lire le plus possible et surtout, apprendre et connecter avec les autres. Naviguant tant bien que mal à travers la vingtaine, elle trouve ses assises dans la lecture et l’écriture, cherchant toujours à comprendre un peu mieux les contradictions qui rendent la vie intéressante. Elle croit que la littérature fait partie de ces choses qui peuvent changer une vie, la rendre un peu plus douce et mettre un baume là où il faut.

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