J’ai entamé ma lecture de Comment faire l’amour avec un Nègre sans se fatiguer avec plusieurs horizons d’attente. Premier roman de Dany Laferrière, immortel de l’Académie française, il y a de quoi s’exciter! Pourtant, l’utilisation du mot « nègre », le n-word, dit-on même au 21e siècle, me laissait sceptique…

Ici Radio-Canada
Publié en 1985, le récit de Dany Laferrière se déroule à Montréal. Les deux protagonistes, Bouba et Vieux, réfléchissent sur le monde et sur le racisme. Le racisme dont on commençait à s’inquiéter dans les années 1980 au Québec et qui trouve beaucoup de résonance chez le lecteur des années 2000. Je n’ai pas besoin de vous rappeler le scandale de Louis Morissette et des moustiques…
Le ton de Laferrière est toujours très badin : j’ai beaucoup ri en lisant les aventures amoureuses du narrateur, jeune écrivain qui cherche à publier son premier roman. L’écriture est simple, précise, bien qu’enchâssée de références du Coran, d’Henry Miller, de Chester Himes, de jazz, etc. C’est une mosaïque éclectique de couleurs, de sons, d’odeurs et de mots sur fond de canicule montréalaise au Carré Saint-Louis.
Le message du roman est profond, subtil et primordial : la société nord-américaine est inévitablement empreinte de racisme, de sexisme et de préjugés de toute sorte. Le « Nègre » ne possède qu’une valeur exotique, il n’a pas d’identité propre hormis celle du primitif, du sorcier, du baiseur. Et les Blanches ne sont que des femmes qu’on amalgame pêle-mêle, proies de prédilection pour les « Nègres ».
Le constat est sombre, mais le narrateur apprenti écrivain en tire le meilleur parti possible, en amour comme en écriture : il écrit et fait l’amour sans se fatiguer.
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