Bondrée, Andrée A. Michaud
En 1967, à Bondary Pond (rebaptisé Bondrée), des vacanciers passent la période estivale dans leurs chalets au bord d’un lac entouré de la densité de la forêt. L’endroit se situant quelque part entre les frontières du Maine et du Québec, la différence linguistique pousse les habitants francophones et anglophones à vivre en parallèle. Ce sont des événements horribles, les meurtres de deux adolescentes, qui rallieront les deux clans.
Bondrée, qui se veut un thriller, est beaucoup plus qu’une intrigue. Le roman est un magnifique portrait des années 60, ayant réussi à me rendre nostalgique d’une époque durant laquelle je n’étais pas née.
Rien ne semblait pouvoir assombrir l’indolence bronzée de Bondary, car c’était l’été ’67, l’été de Lucy in the Sky with Diamonds et l’Exposition universelle de Montréal, car c’était le Summer of love, clamait Zaza Mulligan pendant que Sissi Morgan entonnait Lucy in the Sky et que Franky-Frenchie Lamar, munie d’un cerceau orangé, dansait le hula hoop sur le quai des Morgan.
C’est un roman d’ambiance, beau et lugubre à la fois. Le style d’écriture de l’auteure est envoûtant et poétique. En lisant Bondrée, le lecteur risque d’être enivré par les mots, autant, sinon davantage, que par l’histoire. Pour ma part, les mots alternant du français à l’anglais m’ont charmée dès les premières pages.
Who are you, for Christ’s sake? Et l’ombre demeurait muette. Immobile et muette. Seul le bruit de son souffle parvenait à Zaza, qu’elle s’efforçait d’associer à celui du renard qui avait surgi devant elle, tantôt, wind on my knees, fox in the trees.
La beauté poétique du texte est sa première qualité. L’alternance des voix, celle d’un narrateur extérieur et celle d’une jeune fille de 12 ans (que l’on voit tranquillement devenir une adolescente au fil de son récit), rend la lecture efficace. La psychologie des personnages est d’une finesse remarquable. Quant à l’intrigue, quoique bien ficelée, j’avoue avoir réellement embarqué dans celle-ci assez loin dans l’histoire, soit après le meurtre de la deuxième fille. Si j’ai ralenti le rythme de ma lecture vers le milieu du livre, les dernières pages se lisent rapidement. J’ai terminé la dernière page à contrecœur. Pas parce que j’aurais voulu que l’intrigue se poursuive, mais parce que l’ambiance dans laquelle le roman m’a plongée allait me manquer.
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