Un jour je te dirai tout de Brigitte Haentjens est une petite plaquette de 105 pages chargée de passion, de sensualité, de désir. C’est un roman qui se lit d’une traite et qui, je vous préviens, comporte énormément de scènes qui, comme le mentionne le quatrième de couverture, «explore les états limites de la sexualité». Le point focal du roman est cette passion des corps qui anime les deux protagonistes et l’auteure prend un plaisir certes à détailler cette faim.
Sans trop d’ancrage ni dans le passé ni dans le futur, on se retrouve plutôt dans le présent d’une fortuite rencontre entre Elisa, Parisienne, et Olav, Montréalais d’adoption. C’est dans une Islande qu’on reconnaît, sans qu’elle ne soit nommée, que les deux personnages brûlent, l’un pour l’autre, d’un désir qui n’en finit jamais d’être assouvi. L’appel de la chair est constante, mais au-delà des corps se trouve aussi bien autre chose. Un besoin de l’autre, un désir de partage constant, un ancrage, quelque chose de plus fort qu’eux.
À travers ces moments charnels qui habitent le récit, à travers les instants d’insatiable passion et de désir, on retrouve aussi des rires, une complicité naturelle et beaucoup de tendresse entre ces deux quasi-inconnus. On y croit et on veut y prendre part, nous aussi.
Ce qui, à mon avis, reste le plus intéressant dans Un jour je te dirai tout, outre la magnifique plume de Brigitte Haentjens, ce sont ces petits bouts de pensées, mis en italique, qui parcourent le texte. On se trouve captivé par l’esprit d’Elisa qui, malgré la passion, est prise de pensées noires, de souvenirs d’enfance, d’un père contrôlant et de femmes auteures et artistes qui se sont donné la mort. Ça vous semble être un drôle de mélange ? Pourtant non, c’est ce qui propulse le livre hors d’une simple passion. Pas qu’une passion n’aurait pas été assez, simplement que cette nouvelle dimension donne un souffle différent au récit. On y retrouve deux personnages guidés par leurs corps et leurs envies, tout en découvrant, au compte-gouttes, ce qui les a brisés, ce à quoi ils ont survécu, ce qui les apporte à vivre aussi intensément cet appel de la chair.
Que ce soit pour les descriptions de lieux, des envies, des moments, on ne peut passer outre la beauté des écrits de Haentjens. Un roman qui propose autant de scènes charnelles aurait facilement pu tomber dans l’exagération, l’énumération, voire le grossier, mais tout ce que semble toucher l’auteure est plutôt emprunt de poésie, de douceur et, justement, de désir. Elle réussit très bien à nous faire vivre cette tension qui habite Olav et Elisa.
Un jour je te dirai tout est donc le court et fort récit d’un instant. D’un de ces instants dont on s’imprègne, dans lequel on habite, le temps d’une lecture, et duquel on se désole un peu de ressortir aussi rapidement, à l’image de cette fulgurante passion qui consumera les deux protagonistes.
Aimez-vous les romans qui parlent de passion et de désir sans tomber dans les clichés et l’érotisme facile ? Quels sont vos suggestions ?
Le fil rouge tient à remercier Boréal pour le service de presse.
Photo : Martine Latendresse Charron