N’étant pas la plus grande lectrice de romans graphiques, je ne croyais pas un jour écrire un article portant sur ce genre littéraire. Or, dans le cas de La légèreté, je trouvais inévitable de partager ce coup de cœur.
La scénariste et illustratrice de La légèreté est Catherine Meurisse, dessinatrice à Charlie Hebdo. Au moment de l’attentat contre le journal, elle y travaille depuis près de 10 ans. Or, ce 7 janvier 2015, elle arrive en retard à la conférence de la rédaction et survie à l’attentat alors que ses collègues, amis et mentors sont tués et blessés à l’intérieur des lieux. Dans la Légèreté, elle explique son processus pour guérir de l’immense blessure créée par cet événement tragique et retrouver sa légèreté.
La légèreté, c’est tout ce que j’ai perdu le 7 janvier 2015 et que j’essaie de retrouver. La légèreté, c’est aussi le dessin.
L’art comme remède à la douleur
Vivant un profond traumatisme à la suite de ces événements, Catherine Meurisse dépeint, dans la première partie, les dix mois qui suivent l’attentat alors qu’elle est confuse et ébranlée, qu’elle est incapable de retrouver un sens sa vie et qu’elle ne sent plus la force de dessiner. Petit à petit, elle cherche à se départir de cette douleur et elle en vient à la conclusion que pour l’atténuer, elle doit «être submergée par la beauté». Elle explique qu’elle veut vivre le «syndrome de Stendhal», lequel aurait été pris d’un vertige lorsqu’exposé à une surcharge d’œuvres d’art lors d’un voyage en Italie.
Je suis en quête du syndrome de Stendhal, seul capable à mes yeux d’annuler le syndrome du 7 janvier.
L’exil à Rome
Pour mettre à exécution sa résolution, Catherine Meurisse se rend à Rome pour y faire une résidence d’auteur à la Villa des Médicis. La deuxième partie du livre relate ce séjour dans la capitale italienne. Au départ, Catherine Meurisse parcourt Rome en quête de beauté, mais elle ne peut s’empêcher de sans cesse faire des liens avec les attentats du 7 janvier et les œuvres d’art qu’elle observe. Puis, graduellement, elle apprend à retrouver la beauté dans l’art. Elle saura même faire preuve d’humour. Au final, c’est cette obsession de la beauté qui lui permettra de se relever.
Survivre à l’inconcevable
Ce roman graphique témoigne de manière très personnelle et touchante de la douleur qui peut être ressentie devant un événement aussi tragique. Bien qu’une telle tragédie ne puisse être oubliée, Catherine Meurisse démontre que cette douleur peut être atténuée et que l’on peut retrouver sa légèreté. Les dessins suivent les états d’âme de Meurisse en évoluant en même temps qu’elle reprend vie. J’ai particulièrement aimé les dessins épurés aux couleurs douces qui s’agencent parfaitement, à mon avis, avec le titre du livre.
Dans sa préface, Philippe Lançon, l’un des survivants de l’attentat, écrit ceci : «Catherine enlève à la beauté tout le poids qui nous empêche si souvent d’en profiter». Cette phrase résume avec perfection ce que j’ai ressenti en lisant ce livre et c’est parce que dans ses premières pages il relatait l’inconcevable qu’à la fin on est autant touché.
Croyez-vous au syndrome de Stendhal?
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