Littérature québécoise
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Une auteure et son œuvre : Sophie Bienvenu

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Sophie Bienvenu est une écrivaine franco-québécoise, d’origine belge et française. Elle s’installe au Québec en 2001, après avoir fait ses études à Paris. Aujourd’hui, elle s’identifie presque davantage à son pays d’adoption qu’à la France, car les Québécois lui semblent plus proches de sa culture belge. Elle œuvre dans les milieux du web, du journalisme et de la communication, mais écrire des romans demeure sa passion la plus puissante. Une passion qui se sent à travers ses mots, et qui est particulièrement contagieuse.

Lucie le chien (2006) 

Cette première publication de Sophie Bienvenu rassemble les meilleurs billets de son blogue du même nom. Plutôt court, écrit dans un style léger et facile à lire, ce petit livre est parfait pour les lectures à temps perdu; en attendant l’autobus, par exemple. Il annonce également un thème que l’on retrouvera souvent au cœur des œuvres de l’auteure : les chiens. Étant elle-même une grande amoureuse des animaux, Sophie Bienvenu trouve important de parler de ces bêtes souvent mal-aimées, particulièrement dans notre province. Et il ne faut pas se méprendre : ce livre a beau parler d’un chien, il n’est pas destiné aux enfants! La narration entre dans la tête de Lucie, qui nous parle de son quotidien aussi bien que de questions existentielles propres à l’humain. Le tout avec une bonne dose d’humour, parfait pour égayer une grise journée.

Et au pire, on se mariera (2011)

Premier roman de l’auteure, ce livre sera aussi celui qui aura changé sa vie, car son immense popularité lui permet de quitter son emploi et de se consacrer à l’écriture. Sophie Bienvenu fait parler une jeune fille de 13 ans, Aïcha, amoureuse d’un homme ayant le double de son âge, Baz. Ce dernier veut aider l’adolescente qui lui semble perdue, mais Aïcha est prête à tout pour obtenir de lui ce qu’elle désire : connaître l’amour. La protagoniste ne connaît pas non plus son père biologique; elle vit seule avec sa mère, avec qui elle entretient une relation houleuse. Racontée dans les mots d’Aïcha, l’histoire se transforme en un labyrinthe où vérité et mensonge se confondent. Cette voix d’enfant, d’une naïveté et d’une dureté qui s’opposent, rend la narration percutante. La jeune Aïcha s’exprime en un québécois vibrant, à fleur de peau : l’auteure adore écrire le parler québécois, car cette langue vivante confère à ses récits une certaine authenticité documentaire, aspect très important de ses œuvres.

Et au pire, on se mariera est présentement à l’affiche au cinéma depuis le 15 septembre, ce qui consiste aussi en une première pour Sophie Bienvenu, qui a endossé le rôle de coscénariste aux côtés de Léa Pool pour cette adaptation. Nul doute que le succès remporté par l’auteure grâce à cette œuvre n’est pas près de s’éteindre!

En fait, je voudrais être une pute, oui, mais juste avec un client. […] On aurait un contrat qui dit que je peux juste être sa pute à lui, et lui mon client à moi, et qu’il doit s’occuper de moi, et moi de lui. Ce serait la loi. Mais au pire, si c’est trop compliqué, on se mariera.

Chercher Sam (2014)

C’est l’histoire de Mathieu, en situation d’itinérance au moment du récit, qui cherche sa chienne Sam, une jolie pitbull. Le jeune homme a tout perdu et lui est très attaché, car l’animal reste son dernier lien avec sa vie passée, et le deuil tragique qui l’a fait sombrer. C’est pourquoi, lorsqu’il perd sa trace par une journée comme les autres, Mathieu est au désespoir. Le lecteur est appelé à le suivre dans ses recherches courageuses et inlassables, et à se perdre dans la touchante histoire du protagoniste, laquelle se dévoile de manière à nous tenir solidement en haleine jusqu’à la dernière ligne, caractéristique bien propre au style de Sophie Bienvenu. Chercher Sam donne la parole à ceux qui n’en ont pas, en choisissant un homme itinérant, mais aussi une pitbull, la race de chien la moins aimée actuellement. Cette thématique de la relation homme-chien reviendra dans Autour d’elle, où une jeune fille remplit son vide intérieur grâce à l’amour qu’elle développe pour un chiot trouvé au fond d’une poubelle. Sophie Bienvenu aime secourir les mal-aimés sans défense, les victimes de notre société. Elle aime aussi s’adresser aux jeunes, leur donner le goût de lire; cette mission sera particulièrement réussie avec son deuxième roman, qui s’est avéré très populaire auprès des jeunes garçons, tant au secondaire qu’au cégep. Je vous avais bien dit que sa passion était contagieuse!

Autour d’elle (2016) 

Ce roman fut mon plus grand coup de cœur parmi les œuvres de Sophie Bienvenu : je n’ai pu me plonger dans aucun autre livre depuis que je l’ai terminé, il y a quelques semaines, tant sa lecture m’a marquée. C’est le genre de livre qui reste avec nous pendant longtemps, qui s’obstine à ne pas quitter nos pensées.

Sophie Bienvenue change de style pour cette œuvre, et décide d’abandonner la narration à la première personne pour laisser une vingtaine de personnages raconter leur histoire. Tous très différents les uns des autres, ces narrateurs ont cependant tous un souvenir à nous raconter à propos d’un certain Adrien, mais surtout de sa mère, Florence Gaudreault, car c’est autour d’elle que tourne le récit. Cette jeune femme, que l’on touche presque uniquement à travers le regard d’autrui, cache un lourd passé et un abandon déchirant : celui de son fils, résultat de son amour et de sa confiance envers un garçon qui ne les méritait pas, et qu’elle met au monde à 16 ans. Après cette épreuve, Florence laisse sa vie derrière elle pour se reconstruire ailleurs, loin de son enfant placé en adoption auprès d’une riche famille, de sa ville natale et de ses parents absents. Tous ceux qu’elle croise ont vécu le même genre d’expérience : l’auteure présente ici des abandons ordinaires, car la perte est selon elle une souffrance universelle.

L’histoire de Florence m’a beaucoup touchée, car cette dernière a osé ce que peu d’entre nous ont le courage de faire, soit de tout abandonner. Bien que ce courage soit le résultat d’une brisure, il n’en demeure pas moins honorable. J’aimerais qu’elle soit réelle afin de pouvoir la rencontrer, ce qui ne m’était jamais arrivé avec un personnage fictif auparavant. Sophie Bienvenu rend ses personnages vivants, avec une adresse éblouissante qui illumine chacun de ses mots.

Je vais sonner vieille conne, justement, mais la vie, c’est ça : une série de deuils. Même quand t’es heureux, les moments de joie passent, et il ne te reste plus rien que du vide, à la fin. J’ai vécu des années à vouloir ne rien avoir à perdre. Et tu vois, aujourd’hui, j’ai pas accumulé grand-chose. Du moins rien d’important. Et j’ai souffert pareil.

Sophie Bienvenu est une auteure assez prolifique : loin de se limiter aux récits nommés plus haut, son œuvre se garnit également d’un recueil de poésie, ainsi que de plusieurs nouvelles et autres contributions à divers magazines et collectifs. Elle vient tout juste de publier sa première histoire pour enfant, La princesse qui voulait devenir générale, un conte féministe paru aux Éditions de la Bagnole.

Grâce à sa plume foudroyante, qui dépeint avec réalisme les réalités les plus tristes de la société occidentale d’aujourd’hui, Sophie Bienvenu assure à ses œuvres contemporaines une place parmi les classiques. Pour ma part, elle est une  importante source d’inspiration.

Et vous, avez-vous eu la piqûre pour les mots de cette écrivaine?

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