Poésie et théâtre
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Queues, nom féminin pluriel, définition populaire : membre viril –

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Je ne suis pas très poésie. J’essaie vraiment fort, mais j’ai toujours un peu de difficulté à accrocher. Pourtant, dès que j’ai vu Queues, le recueil de Nicholas Giguère publié chez Hamac (maison d’édition que j’adore!), j’ai tout de suite eu envie de le lire. Il y a de ces titres qui vous accrochent, qui vous promettent satisfaction. La poésie contemporaine a cet avantage de me raconter l’humain dans sa bestialité, dans sa sexualité et sa violence refoulée, sans romantisme ni métaphores indécidables.

Il s’agit d’une accumulation de textes publiés ça et là par l’auteur, rassemblés en une petite planchette et recousus bout à bout. Il n’y a pas de chapitres, ni de titres, ni même de temps d’arrêt, pour tout dire. Le rythme de lecture varie de rapide à excessivement précipité, il ne tombe jamais dans le lent. Queues se lit d’un bout à l’autre en une seule fois, en un seul souffle qui reste coincé dans la gorge jusqu’à la fin.

entre le souper et la vaisselle

j’imagine que je devrais me poser des questions comme :

quand est-ce que je vais avoir mon 1,4 enfant

est-ce que je vais acheter une maison

à quand mon mariage

mon divorce

jusqu’à date tous mes bébés sont morts

dans des Kleenex

(p. 21)

L’auteur et narrateur nous propose un plateau de situations où se mélangent mal-être et plaisir charnel. On y découvre un homme en colère contre une société homophobe, un homme qui s’adonne à sa passion afin de faire exploser l’hétérocentrisme de tout ce qui l’entoure. Cette passion : sucer des queues.

Vous l’aurez deviné, le langage est cru et les mots sont bien pesés. Mais c’est dans cela que le recueil prend toute sa force de caractère. On découvre un homme qui en a assez, qui accumule les baises afin d’oublier, un petit peu, sa solitude. Pas solitude en tant que célibataire, solitude en tant que gai qui veut s’affirmer tel qu’il est. Il n’en a rien à foutre de l’image qu’un vrai gai devrait projeter, tellement différente de l’image d’un straight, n’est-ce pas?

on tolère le monde aux cheveux gras

on tolère Éric Salvail

on tolère les famines

la vente de l’eau au plus offrant

les enfants soldats

[…]

on tolère l’intolérance

on tolère l’intolérable

[…]

on tolère tout ça

mais depuis quand on doit tolérer l’homosexualité

(p. 64)

Queues est un roman par poèmes qui balance des coups de poing et ne manque jamais sa cible. Vous serez touché et chamboulé par la véracité et la puissance des propos de Giguère. Car nous sommes tous un peu coupables de ce mal de vivre. Nous formons une société intolérante qui se dit ouverte, une société d’acceptation qui rabaisse les différences jusqu’à les éliminer. Nous sommes des individus accueillants dans une société qui ferme des portes. Nous sommes, de près ou de loin, les milliards de raisons pour lesquelles des gens comme Nicholas Giguère s’ancrent dans une routine d’excès afin de combler le peu de place qu’on leur laisse.

Cet homme à la poésie brute nous crie notre vérité, il nous crache son désarroi en plein visage. Prenez le temps de l’entendre, permettez-vous cette ouverture à l’autre, pour une fois.


Le fil rouge remercie les éditions Hamac pour le service de presse.

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