À la fin de l’année 2015, j’ai souhaité me fixer un objectif d’écriture pour l’année suivante. Je ne savais pas encore comment, mais je sentais en moi un besoin urgent de réaliser quelque chose, de créer. Avec trois enfants à la maison, je ne dispose que de brefs moments pour moi, souvent sollicitée, souvent interrompue. Je trouve du temps, mais il est souvent morcelé, comme des petits bouts de papiers que j’ai bien du mal à mettre bout à bout parfois. Je perds souvent le fil de mes pensées…
De ce constat est apparue l’idée du haïku. Ces petits instants de vie pris sur le vif, tels des clichés photographiques de nos émotions.
Et si je faisais de mes petits bouts de papier une page entière, voire un carnet tout entier?
J’avais mon fil (rouge): un haïku par jour pendant 365 jours!
De la rigueur et de la constance
Le principe était simple. Tous les soirs, avant de me coucher, j’écrirai sur une page de mon carnet un haïku résumant ma journée, ou du moins mon ressenti par rapport à cette journée. J’essaierai de trouver des moments positifs et gratifiants, de voir le beau autour de moi.
Trois vers seulement. J’en étais capable. J’étais loin des trois pages du matin préconisées par Julia Cameron!
Oui, mais pourtant… Combien il m’a été difficile parfois de trouver ces trois vers-là! Combien il m’a été difficile de puiser le beau à travers une journée éprouvante, voire douloureuse. Bien calée contre mon oreiller, je restais là, un long moment, la mine en l’air et l’air de rien, rien ne venait.
Et d’autres soirs, les mots et leurs images venaient plus facilement.
Et puis vient le vent
La pluie sur le carreau
Me pique le cœur
Avancer à petits pas
Haïku après haïku, mon carnet se remplissait. Un jour à la fois, une page à la fois. J’avais le sentiment de construire quelque chose, une pierre après l’autre. Lorsque je regardais devant moi, je me disais que c’était bien trop long 365 jours! Mais plus j’avançais, et plus j’étais fière de moi. Comme lorsque l’on est sur un sentier de montagne et que le sommet nous semble inatteignable. Pourtant on continue de marcher, d’avancer, un pas après l’autre. Et ces pas, mis bout à bout, nous conduisent vers notre objectif.
J’étais sur mon chemin.
La route est libre
Le chemin dégagé
Avance!
Et comme tout chemin que l’on arpente, il est semé d’embûches. Je me souviens d’avoir oublié, certains soirs, trop épuisée ou parce que je n’étais pas chez moi. Il me fallait alors reprendre le fil de mon existence, celle de la veille ou encore du jour d’avant. Je me retrouvais à écrire non pas un mais deux voire trois haïkus, chacun témoignant d’un état émotif différent.
J’aurais pu laisser faire. Mais je tenais à cette constance. Je tenais à reprendre le fil de mon écriture.
Capter l’instant
Parce que le haïku est un petit poème très court (17 syllabes en 3 vers seulement), il va à l’essentiel. Il nous dit «ce qui se passe à un instant donné» comme l’écrit Bashô. À une époque où tout semble aller de plus en plus vite, où nous sommes sans cesse sollicités par les médias, la publicité prônant le meilleur du meilleur et le désir de l’homme d’aller toujours plus vite, toujours plus loin, l’écriture de haïku permet de reprendre contact avec soi et de vivre pleinement l’instant présent.
Cette année d’écriture m’a permis de capter tous ces moments auxquels je ne prêtais pas toujours attention et qui rythment pourtant ma vie, comme des rayons de soleil. Cela m’a donné l’occasion de voir au-delà des apparences, d’apprendre à être attentive, reconnaissante, à l’écoute et de reconnaître le Beau autour de moi.
Même pourchassé
Le papillon
Ne semble jamais pressé
(Garaku)
Et si nous cherchions le beau autour de nous tout en cultivant notre processus d’écriture? Et si nous prenions le temps de photographier ces instants dans nos carnets plutôt que sur les réseaux sociaux, en étant présent, pour nous-même?
Pour découvrir le haïku et ses formes, voici quelques ouvrages qui m’ont inspirée:
- Petit manuel pour écrire des haïku, Philippe Costa
- Mon livre de haïkus, à dire, à lire et à inventer, Jean-Hugues Malineau et Janik Coat
- Haïkus du chat, Minami Shinbô
- Haïkus du temps présent, Mayuzumi Madoka
Ainsi que l’article de Louba-Christina Michel, sur notre site !
Cet article lu
Me donne très envie
D’écrire des poèmes
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Très envie aussi*
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Je partage complètement vos difficultés de création en tant que mère de famille. Pour moi, le temps des enfants à la maison est passé, mais avoir une permanente attitude de gratitude et d’émerveillement amène à rester alerte, vivante. Bravo et merci pour votre témoignage !
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