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Gilead, quinze ans plus tard

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Il aura fallu près de 35 ans à l’autrice Margaret Atwood pour nous servir la fameuse suite de son roman dystopique, probablement son plus connu, La servante écarlate. Bien qu’elle terminait déjà ce dernier sur des « Notes historiques », projetant les lecteurs et lectrices en 2195 alors qu’un colloque universitaire se penche sur les écrits laissés par June, comme un héritage, un testament, c’est en fait la société d’aujourd’hui qui a invité, tout naturellement, l’autrice canadienne à poursuivre l’écriture de cette histoire. Il y a un peu plus d’un an, j’abordais ce sujet dans un article que vous pouvez lire juste ici pour vous remettre dans le bain.

Cet épilogue agit telle une lueur d’espoir à la fin de ce roman désolant, obscur et loin d’être réjouissant. Bon, c’est un bien simple baume pour tout ce que nous avons enduré à travers ces 483 pages, me direz-vous, mais il demeure qu’une part de lumière réside au sein de ces dernières lignes. Effet semblable à celui suscité par l’appendice que l’on retrouve dans l’œuvre de George Orwell, 1984. À ce propos, Atwood avoue s’être inspirée de celui-ci pour écrire les « Notes historiques » présentes à la fin de La servante écarlate.

Dans la même veine, Les Testaments ne nous laisse pas les mains vides, le cœur glacé et les yeux mouillés. Si La servante écarlate mettait principalement en scène l’implantation du régime dictatorial de la République de Gilead, sa suite y articule plutôt sa déchéance, pour le plaisir de tous les admirateurs et admiratrices de l’œuvre.

Trois narratrices valent mieux qu’une

Atwood ancre Les Testaments quinze ans après les événements impliquant June, protagoniste principale du premier roman. Malheureusement, les commandants et leurs sbires sont toujours au pouvoir dans la grande majorité des États-Unis. En contrepartie, un soulèvement se prépare. Une rébellion, venant de tous bords tous côtés, autant de l’extérieur que de l’intérieur des frontières invisibles séparant le monde décent de celui régi par le régime théocratique, est tapie dans l’ombre.

Ce sont trois femmes, n’ayant à première vue rien en commun, qui s’uniront pour mettre à feu et à sang des années de contrôle, de soumission et de sévices de tous genres. La mort d’un modèle d’une telle violence ne pouvait prendre fin que sous les mains de femmes. Nous les suivons d’abord séparément, car elles ont chacune leur histoire, leur passé et leur parcours avant que ceux-ci les mènent à leur fameuse rencontre.

Je ne dévoilerai pas l’identité des trois femmes. Je n’ai pas eu la chance de pouvoir faire mes propres déductions en raison d’un divulgâcheur mal accueilli. Je ne souhaite donc pas vous faire vivre ma propre expérience. Tout ce que je peux préciser, c’est que les chapitres qui accompagnent chacune des narratrices ont des titres respectifs, qui sont les suivants :

  • « Testament olographe d’Ardua Hall » (avec l’image d’un stylo)
  • « Transcription des déclarations du témoin 369A » (avec l’image d’une servante)
  • « Transcription des déclarations du témoin 369B » (avec l’image d’une jeune fille)

La pluralité des voix nous permet de comprendre la problématique de Gilead (maintenant Galaad dans le nouveau roman) sous des angles divers. Toute réalité n’est pas comparable et, parfois, il est possible de le saisir seulement grâce à la confrontation des vécus. La divergence des opinions sur un sujet choisi est souvent représentative des milieux culturels desquels sont issus les individus, ce que donne à voir Les Testaments. Il s’agit probablement d’une des plus grandes forces de ce roman d’Atwood.

Roman nécessaire?

Plusieurs diront que Les Testaments n’était pas nécessaire et que la première fin de La servante écarlate, celle mettant en scène le destin incertain de June alors qu’elle est amenée vers une destination inconnue dans un fourgon, était plus intéressante vu les multiples possibilités d’ouverture qu’elle proposait. Néanmoins, je crois que cette suite révèle véritablement les mécaniques sous-jacentes à l’installation de Gilead. Nous en comprenons mieux le fonctionnement et nous ressentons encore plus, quoique c’était déjà un peu le cas, les nombreuses pertes que subissent les femmes qui y vivent, premières victimes du régime, et ce, autant celles qui y ont grandi, que celles qui ont participé à son ascension. Somme toute, il y a place à la rédemption et, pour être de celles qui croient en la réhabilitation, j’étais bien heureuse de lire qu’il y a toujours place à la réflexion humaine et empathique, même dans un univers noir, asservissant et aliénant.

Et vous, lirez-vous la suite de La servante écarlate? Dans le cas contraire, pourquoi refusez-vous de le faire? Est-ce parce que vous êtes pleinement satisfaits du premier roman ou, même, de la série télévisée?

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Mais qu’importe l’éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l’infini de la jouissance?» (Charles Baudelaire, Le Spleen de Paris) Les vers de Baudelaire auront été la source de son épanouissement en tant que bizarroïde de ce monde. La poésie, Marika la vit au quotidien à travers tous les petits plaisirs qui s’offrent à elle. Une grimace partagée avec une fillette dans le métro, la fabrication d’un cerf-volant dans un atelier strictement réservé aux enfants, un musicien de rue interprétant une chanson qui l’avait particulièrement émue par le passé, lui suffisent pour barbouiller le papier des ses pensées les plus intimes. Chaque jour est une nouvelle épopée pour la jeune padawan qu’elle est. Entre deux lectures au parc du coin, un concert au Métropolis et une soirée au Cinéma du Parc pour voir le dernier Wes Anderson, elle est une petite chose pleines d’idées et de tatouages, qui se déplace rapidement en longboard à travers les ruelles de Montréal. Malgré ses airs de gamine, elle se passionne pour la laideur humaine. Elle est à la recherche de la beauté dans tout ce qu’il y a de plus hideux. Elle se joint au Fil Rouge afin de vous plonger dans son univers qui passe des leçons de Star Wars aux crayons de Miron en faisant un détour par la voix rauque de Tom Waits et le petit dernier des Coen. Derrière son écran, elle vous prépare son prochain jet, accompagnée de son grand félin roux, d’une dizaine de romans sur les genoux et d’un trop plein de culture à répandre

4 Comments

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  2. Nicole Berard says

    Beaucoup moins sombre que la servante, une lueur d’espoir, un espoir de résilience..l’humain finit toujours par se rebeller contre la dictature et la corruption. Le personnage de tante Lydia est particulièrement intéressant et complexe.
    Ce roman se lit comme un polar!

    Aimé par 1 personne

  3. Tu m’a convaincue! Bon, je pensais le lire de toute façon, parce que j’avais adoré La servante écarlate, mais je suis toujours un peu réticente à lire des suites de peur d’être déçue. Tes arguments me plaisent bien et je vais les garder en tête pendant ma lecture.

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