Art et créativité
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« Le profil Amina »: un documentaire sur le pouvoir de l’amour et du web

89516b4f7c575a525230a40181e0f831Amour, révolution et identité virtuelle, ce sont là les trois thèmes principaux du documentaire de Sophie Deraspe. 

Amour parce qu’Amina Arraf charme Sandra Bagaria et que Sandra s’attache à Amina. Elles communiqueront pendant six mois par courriel, chat et photos. Elles se plaisent, se désirent et deviennent de plus en plus près l’une de l’autre. Assez pour se considérer comme un couple et assez pour s’ennuyer lorsque l’autre ne donne pas signe de vie pendant 24 heures. Parce qu’Amina habite en Syrie et Sandra, à Montréal.

Révolution parce qu’Amina est une jeune lesbienne de Damas qui se crée un blogue pour assumer son orientation sexuelle, mais aussi ses croyances politiques. En plein printemps arabe, Amina souhaite une révolution et ses écrits deviennent rapidement source d’intérêt occidental et oriental. Elle raconte avoir été arrêtée, avoir été secourue et être en danger continuel. C’est ainsi qu’elle capture l’attention de tous les médias de la planète. En 2011, la disparition d’Amina avait suscité un grand tollé médiatique; il fallait la retrouver, la sauver et ainsi, envoyer un message social.

Identité virtuelle parce qu’en se mettant à la recherche d’Amina, les médias du monde entier, et Sandra, réalisent qu’elle est introuvable… Suite à d’innombrables recherches, on réalise que les photographies d’Amina sont en fait celles d’une anglaise et qu’Amina elle, n’a jamais existé. Il s’agit de la création complète d’un américain, Thomas MacMaster.

Le documentaire, réalisé par la québécoise Sophie Deraspe, est tout en nuance et en délicatesse. L’amour ressenti par Sandra étant, lui, réel, on y présente une histoire d’amour de plus en plus classique à notre ère; celle de la relation longue distance. Sandra et Amina passent en moyenne plus de trois heures par jour à communiquer et ce, sans compter les entrées quotidiennes d’Amina sur son blogue personnel, «A Gay Girl in Damascus». Une réelle complicité et une attirance se créent chez les deux femmes, ce qui vient d’autant plus rendre incompréhensible le but de MacMaster. Ce dernier avoue à la toute fin du documentaire, dans une scène extrêmement intense où il rencontre pour la première fois Sandra, qu’il s’est laissé prendre au jeu par son attirance pour la création.

Ses motivations en créant Amina était de créer un personnage complexe et réaliste. C’était aussi une façon pour lui d’avoir une tribune sur des sujets sociaux et politiques. Néanmoins, on se questionne; est-ce simplement un fou? un pervers? un schizophrène ? Il avoue lui-même se l’être demandé. Ayant entretenu le mythe Amina pendant plus de cinq ans et en le cachant à sa propre femme depuis tout ce temps, on ne peut faire autrement que de ne pas comprendre et de trouver cela extrêmement louche. Or, il n’existe encore rien aujourd’hui d’illégal dans ces fantaisies.

Toutefois, là où l’histoire devient réellement horrible, c’est lorsque la nouvelle qu’Amina n’existait pas a fait le tour du monde. Car c’est cela qui a dévalorisé et enlevé de la crédibilité à de nombreux jeunes syrien-nes qui blogguaient et qui tentaient de révolutionner une société sous le régime de Bachar al-Assad. Ainsi, ce sont d’autres jeunes filles homosexuelles qui n’ont pas eu de visibilité internationale et médiatique et qui ont été privées d’aide, qu’au contraire Amina avait reçu. Les médias n’ont démontré plus aucune confiance et surtout aucun intérêt.

Le profil amina est un film qui m’as fascinée. La force des médias, comme leur côté sombre et hypocrite y est démontré. La force de la communauté en ligne, la portée des blogues, y est présente et nous montre qu’avec Internet, tout est possible… L’amour comme le vol d’identité. Je salue l’ouverture de Sandra et sa force face à cette histoire pour nous permettre à notre tour de prendre conscience de ces problématiques de l’ère moderne.

Je vous invite à regarder la bande-annonce pour mieux comprendre l’essence du documentaire.

Et voici une entrevue réalisée à Tout le monde en parle avec Sandra et Sophie.

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Le profil Amina, Sophie Deraspe

En salle depuis le 10 avril 2015

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Lectrice invétérée, Martine est bachelière en études littéraires et la cofondatrice du Fil rouge. Créative et inspirée, elle a l’ambition de faire du Fil rouge un lieu de rassemblement qui incite les lectrices à prendre du temps pour elles par le biais de la lecture. Féministe, elle s’intéresse aux paradoxes entourant les mythes de beauté et la place des femmes en littérature. Elle tentera, avec ses projets pour Le fil rouge, de décomplexer et de dédramatiser le fait d’être une jeune adulte dans une société où tout le monde se doit de paraitre et non d’être. Vivre sa vie simplement et entourée de bouquins, c’est un peu son but. L’authenticité et l’imperfection, voilà ce qui lui plait.

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