Bibliothérapie
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Manger, prier, comprendre, sauver

-Mmmm… c’est… correct… a dit mon ex-chum-un-peu-trop-cinéphile à propos du film.

-Ben non, arrête! C’est suuuper bon! ai-je répondu, tenant à défendre le film que j’avais regardé au moins dix fois. Ou du moins, le livre, lui, est super bon! Je te jure. Il faudrait que tu le lises, tu verrais.

Ce qu’il n’a pas fait, mais ça c’est une autre histoire.

C’est vrai que l’adaptation au cinéma du livre Mange, Prie, Aime de l’auteure américaine Elisabeth Gilbert n’a pas eu que des éloges. Film de filles un peu « cul-cul », manque de profondeur, etc. Mais si le film est passé à côté de certaines choses, le livre reste, selon moi, complet et puissant. Je ne vous parlerai donc pas plus longtemps du film, mais bien de la façon dont le livre qui l’a inspiré m’a plu, c’est-à-dire énormément.

Au début du livre, on pourrait croire que Liz a tout ce qui pourrait la rendre heureuse dans la vie. Elle a un mari, une maison, une carrière prometteuse, mais malgré tout, elle est rongée par l’angoisse et le doute. À l’aube de la trentaine, triste et désespérée, elle se rend compte qu’elle ne désire pas cette maison remplie de meubles achetés à crédit, qu’elle ne veut pas d’enfants et surtout, qu’elle ne veut plus de son mariage. Après un divorce difficile et de grosses remises en question, elle décide de tout quitter pour partir un an en voyage autour du monde. Son but? Partir à la quête d’elle-même et retrouver le bonheur.

La seule idée plus inconcevable encore que celle de le quitter, c’était rester; la seule chose plus impossible pour moi que rester, c’était partir. Je ne voulais rien détruire, ni personne. Je voulais juste m’éclipser discrètement, par la porte de derrière, sans causer d’histoires, sans engendrer de conséquences, et de là courir sans m’arrêter jusqu’au Groenland.

Son périple regroupe trois destinations, dont chacune, dit-elle, viendra lui faire expérimenter une facette de sa personnalité: l’art du plaisir et de la dolce vita en Italie, l’art de la discipline et de la rigueur en Inde et l’art de l’équilibre afin de savoir combiner les deux en Indonésie. Elle raconte, à travers ce livre qui relate son expérience, les réflexions qui l’ont accompagnée et les découvertes qu’elle a faites tout au long de son voyage, sa recherche de la sagesse, du plaisir, et de Dieu, dans le but de retrouver la paix intérieure.

J’avais d’abord lu une première fois ce livre au moment de la sortie au cinéma de l’adaptation qui en a été tirée. Je l’avais apprécié, mais c’est davantage lors de l’expérience que j’ai vécue au Sénégal, alors que je l’avais amené dans mes bagages pendant un séjour de deux mois, que ce petit livre m’a le plus apporté. Pendant ce voyage, j’ai calmé mes propres angoisses à travers celles de Liz, et je suis revenue à ce bouquin encore et encore, le lisant plus d’une fois et y trouvant à chaque relecture des échos de ma propre expérience.

Pour trouver l’équilibre que tu cherches, […] voilà ce que tu dois devenir. Tu dois garder tes pieds fermement ancrés au sol, comme si tu avais quatre jambes, au lieu de deux. Ainsi, tu pourras demeurer en ce monde. Mais ce n’est plus avec ta tête que tu dois le contempler: tu dois le contempler avec le coeur. De cette façon, tu connaîtras Dieu. 

Craquelé de partout, sale et usé d’avoir été trop lu, tellement que j’en connais de grands bouts par coeur, ce bouquin a une place de choix dans ma bibliothèque et dans mes bagages. C’est que ce livre contient un petit je-ne-sais-quoi de rassurant et de motivant. Il nous donne envie de se dégager des mauvaises habitudes qui nous nuisent, de faire le bilan de notre vie, de savourer le monde à coup de bonne nourriture et de changer, partir ou tomber amoureux. D’un autre côté, il nous fait aussi vivre le désespoir, les temps durs d’une dépression, les remises en question et la douleur de la perte. On devient rapidement une copine de l’auteure, qui nous raconte ce par quoi elle est passée, ses aventures, ses nouvelles amitiés, ses expériences gourmandes ou spirituelles. Et par une narration parfois anecdotique, parfois plus intimiste, on la suit à travers son voyage extérieur et intérieur, au fil de ses réflexions touchantes sur l’amour, l’engagement, et l’importance de s’écouter pour trouver le bonheur. Elle se questionne aussi par rapport aux choix de vie que l’on doit faire et parle des étapes qui ont ponctué sa recherche d’équilibre par le voyage et la spiritualité. Et sa quête devient un peu la nôtre, puisque nous nous retrouvons très facilement dans un millier de petits détails qu’elle aborde.

Bien sûr, Dieu est bien présent dans la recherche d’équilibre de Liz. Il occupe une bonne partie du livre, particulièrement lorsqu’elle se trouve en Inde, dans un ashram à prier. Seulement, sa façon bien à elle de l’aborder, parfois avec profondeur et parfois avec humour, en le reliant toujours à son expérience personnelle, n’en fait rien de contraignant, au contraire. Il nous est possible de comprendre, que nous soyons croyant ou pas, et d’entrer avec Liz dans ce qui fait de la spiritualité une source de compréhension de soi et des autres.

Bref, ce livre, séparé en 108 petites parties (à la manière des billes du japa mala, collier utilisé lors de la méditation, composé de 108 perles) est parfait pour un voyage : non seulement il se traîne n’importe où, mais il se lit facilement par petits bouts, que l’on découvre en ordre ou en désordre au gré de nos envies. Et en plus de nous faire réfléchir et de nous confronter, il nous donne surtout une irrésistible envie, nous aussi, de partir, de changer et de nous confronter.

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Marion vit avec la peur constante de manquer de lecture depuis son tout jeune âge, ce qui l’amène trop souvent à surcharger de livres son pauvre dos. Étudiante au doctorat en littérature, elle est aussi passionnée par l’écriture, les voyages et les grandes randonnées. Plus il y a de pages à lire ou de kilomètres à parcourir, plus elle est heureuse. Rêveuse et idéaliste, elle carbure (un peu trop) aux défis, est végane le plus qu’elle peut, et ne pourrait pas vivre sans Harry Potter, le gâteau au chocolat et les carnets de notes. Elle est collaboratrice pour Le fil rouge depuis 2015.

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