Auteur : Roxane Nadeau

Artistes minoritaires : Faut-il ajuster ses exigences?

Lorsqu’on analyse des textes, on peut appliquer le concept de « la mort de l’auteur ». Il s’agit d’un courant qui a proposé une lecture des œuvres laissant place à la virtuosité technique sans prendre en compte l’identité, la réputation ou l’intention des artistes. Jusqu’à présent, quand j’ai accès aux écrits d’autres femmes trans, il m’est impossible d’ignorer dans mon expérience de lectrice le fait que je suis en dialogue avec une voix rare, vulnérable au sein du milieu de la publication. D’une certaine façon, cette prise de conscience teinte ma relation avec le texte : plutôt que d’être à l’écoute de mes déceptions lors d’accident de lecture, je cherche la voix singulière qui dort au milieu des pages. Je reconnais la prouesse technique quand elle est présente, mais mon enthousiasme me permet d’être plus réceptive à un exercice expérimental, plus embryonnaire. Mais est-ce que c’est rendre service à ses comparses du milieu artistique que de les considérer comme dans une catégorie à part? Est-ce qu’il y a un risque de les priver des bénéfices d’une réception critique …

Pourquoi les femmes trans n’écrivent-elles pas?

Se poser la question, c’est aussi se questionner sur la raison d’être de la littérature. « Pourquoi écrire? », c’est la question qu’on m’avait posée dans mon entrevue de sélection pour la maîtrise en création littéraire à l’UQAM. J’avais déjà préparé ma réponse : écrire, c’est ce que les humains font déjà. C’est un moyen de communiquer, mais aussi de réfléchir qui est aussi indissociable d’une société que les phénomènes comme les médias, les contes pour enfants, les rumeurs, les potins. Un livre, pour moi, c’est juste un autre des moyens par lesquels des gens manifestent leur existence, en misant sur leur talent et leurs capacités. Qu’en déduire si un groupe minoritaire est sous-représenté chez les auteurs? Prenons par exemple les femmes trans, magistralement absentes de notre corpus québécois : sont-elles moins créatives ou ont-elles moins de choses à dire que leurs comparses qui ne sont pas trans? J’en doute fort… Il ne suffit pas d’écrire, il faut aussi être lue. Qui dans sa jeunesse n’a jamais rêvé d’être un de ces auteurs du Salon du livre, qui a …

Sophie Labelle : dans le tumulte, rejoindre son public

Sophie Labelle et son travail ont été l’objet d’attaques incessantes de la part de groupes néonazis. Comme nombre de fans de sa BD Facebook pro-trans assignée garçon, je souhaite souligner l’importance de la prise de parole de cette auteure montréalaise. Cette chronique s’intéressera à la toute dernière publication « papier » de la bédéiste, Comment sortir avec quelqu’un quand on est trans et queer. Une histoire intriguante dans un format appétissant Ce qui saute aux yeux, c’est la qualité de l’objet-livre : en couleur à l’extérieur comme à l’intérieur, avec des dessins comportant tous une composition simple, mais truffée de détails judicieux. Pour une publication « maison », la finition n’est pas balayée du revers de la main. Analyser les vêtements des personnages est d’ailleurs en soi un plaisir de lecture. Dans les premières pages, on nous présente les personnages avec de courtes descriptions amusantes, d’une façon qui m’a donné un baume sur le cœur en me rappelant les BDs d’Astérix et Obélix que je lisais, enfant. Pour cette publication, l’histoire ne tourne pas autour de Stéphie, jeune fille trans …

ctivisme transRemove term: art trans art transRemove term: Bibliothérapie BibliothérapieRemove term: Julia Serano Julia SeranoRemove term: Le fil rouge Le fil rougeRemove term: le fil rouge lit le fil rouge litRemove term: lecture lectureRemove term: les livres qui font du bien les livres qui font du bienRemove term: livre par des femmes trans livre par des femmes transRemove term: livres livresRemove term: Outspoken OutspokenRemove term: réflexion littéraires réflexion littérairesRemove term: Serano SeranoRemove term: Switch Hitter Press Switch Hitter PressRemove term: transféminisme transféminisme

Outspoken, la soif de prendre parole

Outspoken, de Julia Serano, compile les textes et essais cumulés pendant dix ans d’activisme transféministe et transgenre. Cinq chapitres contiennent les essais inutilisés dans les dernières publications, les articles de blogues ayant pris la poussière et les œuvres présentées uniquement devant le public. Le tout est commenté par l’auteure, avec la perspective que lui a conféré toutes les années écoulées. Quel est le passage qui a retenu mon attention? C’est au début, un chapitre consacré au volet artistique de la carrière de cette auteure prolifique. Les textes créatifs de Serano, au nombre de 19 dans cette publication, sont généralement des œuvres de « spoken word ». Le style de l’auteure ne joue pas particulièrement dans la subtilité ou le recours à l’imaginaire : elle avoue d’ailleurs elle-même que le fait de partager ses textes sur scène l’encourageait à emprunter un style choquant qui fait bien réagir le public. Néanmoins, les anecdotes qu’elle raconte ont toujours une portée plus grande, elles sont la partie qui contient le tout. Les auteures trans anglophones et états-uniennes sont généralement …