Les Éditions La Peuplade sont pour moi une réelle révélation. Ukraine à Fragmentation, Nirliit et Niko ont fait partie des mes coups de cœur de la dernière année. Encore une fois, j’ai été emballée par des titres publiés par cette maison d’édition en lisant les deux romans de Christian Guay-Poliquin, Le fil des kilomètres (réédité par BQ) et Le poids de la neige. J’ai commencé par la lecture de ce dernier qui a fait son entrée en librairie cet automne. Avant même de l’avoir terminé, je savais qu’il fallait me procurer son premier roman pour poursuivre mon plaisir.
Le fil des kilomètres
Dans Le fil des kilomètres, nous suivons le périple d’un homme qui retourne dans son village natal, un ancien village minier où il n’a pas mis les pieds depuis 10 ans. Alors que ce dernier cherche à revoir son père malade, le lecteur l’accompagne sur la route du kilomètre 0 au kilomètre 4736. L’atmosphère est lourde et angoissante. La chaleur accablante étouffe et une panne d’électricité dure depuis plusieurs jours. Le chaos commence à régner. Des magasins sont dévalisés, des milices bloquent les routes, des agressions sont commises et des maisons sont désertées. Malgré tout, le narrateur n’a qu’un seul objectif en tête, revoir son père.
Le nom du narrateur et des lieux ainsi que les raisons pour lesquelles il n’y a plus d’électricité ne sont pas mentionnés explicitement même si certains indices sont donnés. L’incertitude entourant l’absence de repères crée un climat ambigu qui a fait en sorte que, captivée, j’ai tourné les pages les unes après les autres sans m’arrêter. Habitée par l’urgence d’arriver à destination du narrateur, j’ai voulu le suivre jusqu’au bout dans cette épopée.
Le poids de la neige
En lisant Le fil des kilomètres, j’ai réalisé que Le poids de la neige est la suite de celui-ci. Par contre, je crois que les deux livres peuvent sans problème être lus dans le désordre comme je l’ai fait.
Dans le second roman de Christian Guay-Poliquin, la panne d’électricité se poursuit et les vivres manquent de plus en plus. L’hiver est commencé et nous retrouvons le narrateur du premier roman au kilomètre 4736 gravement blessé à la suite d’un accident de voiture. Il est cloué à son lit dans la véranda d’une maison abandonnée en compagnie d’un vieil homme qui a accepté de prendre soin de lui en échange d’une place lors du prochain voyage vers la ville au printemps. Celui-ci est pressé de retrouver sa femme malade.
Très vite, nous sommes plongés dans ce huis clos entre ces deux hommes dont le cours de la vie a dévié abruptement. Au fil de la lecture, le climat de méfiance et de suspicion laisse place peu à peu à une certaine complicité entre les deux hommes qui doivent apprendre à vivre ensemble pour résister à l’hiver. Le rythme est plus lent que dans Le fil des kilomètres, mais l’auteur réussit encore une fois à nous envoûter à un point tel que nous sommes incapables de mettre le livre de côté.
Un style imagé, mais pas trop
Sans aucun doute, la plume de Christian Guay-Poliquin est ce que j’ai le plus apprécié au cours de la lecture de ces deux romans. Son langage est soutenu et recherché et ses figures de style sont élégantes, parfois surprenantes et toujours bien choisies. Aucun détail n’est oublié.
J’ai particulièrement aimé, dans Le poids de la neige, la description des divers paysages d’hiver qui se déclinent au fil des jours sous les yeux de l’homme blessé. Confiné à l’intérieur d’une maison aux abords de la forêt, il observe par la fenêtre le déploiement de la nature et rapporte au lecteur les différentes formes sous lesquelles se manifestent le vent, la neige, le ciel et les arbres au cours d’un hiver.
La neige et le vent ont cessé subitement, ce matin. Comme une bête qui, sans raison apparente, abandonne une proie pour en chasser une autre. Le silence nous a surpris, dense et pesant, alors que nous avions encore l’impression que les rafales allaient arracher le toit et que nous serions aspirés dans le vide.
Quand on regarde par la fenêtre, on dirait qu’on est en pleine mer. Partout, le vent a soulevé d’immenses lames de neige qui se sont figées au moment même où elles allaient déferler sur nous.
Rarement, le style d’un écrivain vient autant me chercher. À certains moments, je me suis sentie envahie par l’émotion tellement je trouvais les descriptions jolies. Je vais assurément relire ces deux livres pour porter une attention plus particulière à l’écriture. Je vous invite à faire de même et à vous imprégner du style de Christian Guay-Poliquin. Vous ne serez pas déçus.
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