Auteur : Raphaëlle B. Adam

La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert

On dit souvent qu’il ne faut pas juger un livre d’après sa couverture. Dans la vie de tous les jours, je m’efforce d’appliquer ce principe de non-jugement, surtout en ce qui concerne les gens que je rencontre. Mais, il y a environ deux ans, j’ai littéralement jugé un livre d’après sa couverture… et on ne m’y reprendra plus! À la librairie où je travaillais, on recevait à l’occasion des services de presse, livres qui nous étaient offerts gratuitement (et parfois avant leur sortie officielle) afin de permettre aux libraires de découvrir les nouveautés et de mieux conseiller les clients. Ce jour-là, mon assistant gérant m’avait tendu un livre blanc, simple, avec comme illustration de couverture une peinture montrant une rue de village au style vieillot. Joël Dicker, La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert, roman. J’avais examiné le livre dont l’esthétique ne me plaisait pas, parcouru en diagonale la quatrième de couverture… et je l’avais laissé sur le bureau, disant que je n’en voulais pas. (Je sais, il faut être folle pour refuser un livre gratuit. …

La fiction et les amitiés éternelles

C’était un après-midi de congé comme un autre. Je devais avoir 14 ou 15 ans et j’étais occupée à je ne sais trop quoi, lorsque le téléphone avait sonné. Au bout du fil, l’une de mes meilleures amies, en pleurs, peinait à prononcer le moindre mot. Inquiète, je l’avais encouragée à me parler, à prendre de grandes inspirations… et elle avait fini par bredouiller quelque chose qui ressemblait à : «Ils sont morts! » Là, je ne vous dis pas à quel point mon estomac avait été chaviré, l’angoisse se répandant d’un seul coup à travers mon corps. Ils étaient morts? Qui? Ses parents? Nos amis? QUI? Je lui avais répété ce seul mot en guise de question, frénétiquement, tendue dans l’attente d’une réponse. Après quelques sanglots bruyants, elle avait gémi : «Nick pis Anne!» L’information s’était frayée un chemin dans ma tête… mais il ne s’était rien passé. Rien. Nick? Anne? C’est qui, ça? Perplexe, soudainement plus confuse qu’angoissée, je lui avais posé la question. Encore un moment de silence entrecoupé de sanglots. Puis, …

Passions d’enfance

Quand j’étais petite, j’adorais inventer des histoires. Je passais le plus clair de mon temps à me promener dans la maison en narrant des récits à voix haute, quand je n’étais pas en train de demander à ma mère de coucher sur papier les petites aventures qui me traversaient l’esprit (je ne savais pas encore écrire à l’époque, me contentant de noircir des dizaines de petits calepins avec des dessins, produisant ainsi de petits embryons de BD sans texte.) Avec tout ça était venu un grand intérêt pour les jeux de rôle et le théâtre, où je pouvais, comme bien des enfants, m’amuser à incarner divers personnages et donner vie à mes propres récits. Ensuite, quand j’ai su écrire, j’ai développé un véritable amour pour la rédaction. Au secondaire, mes journées scolaires préférées étaient celles où nous étions en « production écrite », ce qui me valait souvent des regards stupéfaits de la part de mes confrères et consœurs, de même que des commentaires pas toujours très édifiants. Ça m’était bien égal: personne ne pouvait m’enlever le …

Kafka sur le rivage

C’était il y a deux ans. Je venais de terminer la lecture de La Ballade de l’impossible (dont Martine a parlé ici!) et j’avais été conquise par la plume de Haruki Murakami, la profondeur de ses personnages, la simplicité de ses descriptions, la mélancolie qui traversait son récit. Un de mes collègues libraires, à qui j’avais fait part de mon appréciation du roman, s’était empressé de me mettre entre les mains Kafka sur le rivage, véritable petite brique littéraire. Enthousiaste, il m’avait dit: « Lis ça, tu vas capoter! » (En réalité, il m’avait plutôt servi une des savoureuses expressions absurdes dont lui seul a le secret, mais je sais que c’était précisément ce que ça voulait dire. J’allais capoter.) Il n’avait pas tort. J’ai adoré le roman, j’ai dévoré les 638 pages en quelques heures à peine. Parce que Kafka sur le rivage est, en bon québécois, « quelque chose ». Là, c’est le moment où je me sens un peu bête. Parce qu’il y a longtemps que je veux écrire une critique sur Kafka, que je veux …

Combattre l’inertie

Avec le printemps qui se pointe timidement le bout du nez et le beau temps qui devrait (théoriquement) revenir, les projets ont tendance à bourgeonner comme les arbres! Évidemment, il n’y a pas un moment de l’année plus propice qu’un autre pour se lancer dans une nouvelle aventure, mais je trouvais que la venue du printemps se prêtait bien à mes propos. « Ah, quand j’aurai du temps, je commencerai à écrire mon roman! » « À un moment donné, quand j’aurai un peu plus d’argent, je vais partir en voyage. » « J’aimerais vraiment me lancer en affaires, mais… c’est trop dur. Peut-être l’an prochain? » « J’ai toujours voulu jouer de la guitare… sauf que pour l’instant, j’ai l’impression que c’est pas le bon moment. Dans quelques années, je vais m’inscrire à des cours! » Ça vous dit quelque chose? Non? Je ne vous crois pas. Tout le monde a déjà, un jour ou l’autre, énoncé un souhait du genre. Bon, durant l’enfance, on le faisait souvent, avec la fameuse mention « quand je serai grand(e), je… » C’était normal, de dire ça. …

L’inspiration (partie 2): quand elle s’éclipse, quand elle revient

Dans mon dernier article, j’abordais la question de l’inspiration, puisée dans les arts et dans tout ce qui nous entoure. Cependant, et la plupart d’entre vous l’ont sans doute déjà expérimenté, on a parfois toutes les bonnes intentions du monde, toute la motivation requise pour créer… mais il ne se passe absolument rien. Rien, rien, rien. La fameuse page blanche, quoiqu’on fasse. Ceux qui valsent régulièrement avec l’inspiration savent qu’elle est une partenaire volage. Elle semble n’avoir ni Dieu, ni maître et s’amuse parfois à nos dépens. Parce que souvent, on s’assoit avec le crayon à la main, on a le temps de travailler, on est prêt à faire progresser notre projet… et elle se pointe le bout du nez pour repartir aussitôt, si elle n’est pas plutôt restée cachée pour nous bouder en paix, sans que l’on sache pourquoi. Et, encore plus souvent, elle décide de venir nous rendre visite et entreprend de nous titiller l’esprit comme jamais, alors qu’on se trouve au travail, au volant, dans l’impossibilité de profiter de sa soudaine générosité …

L’inspiration (partie 1) : arts et interdépendance

Que vous soyez artiste ou pas, les arts occupent une place importante dans votre vie, parfois même à votre insu. Après tout, chaque jour, vous écoutez de la musique, visionnez des films, lisez des livres, admirez des graffitis ou de superbes photographies! Il semblerait que souvent, on ait tendance à oublier que les arts sont partout et, n’en déplaise à certains, qu’ils sont importants. Et pour les artistes, leur importance est encore plus grande, considérant que les arts occupent une immense partie de leur quotidien, que ce soit sous forme de gagne-pain ou de passe-temps. Mon art à moi, c’est l’écriture. Comme des millions d’autres auteurs, j’ai un besoin constant de me plonger dans mes univers afin de mieux jeter sur papier les récits qui traversent mon imaginaire. En me développant en tant qu’auteure, je réalise que l’inspiration est essentielle pour progresser, qu’elle peut se trouver partout… et plus particulièrement dans l’art, quel qu’il soit. Personnellement, je sais que ma créativité fleurit à travers l’écoute de la musique. Instrumentale, elle peut m’aider à me plonger …

« Ce livre-là n’est pas pour toi! »

Quand j’étais ado, j’aimais me rendre à la bibliothèque de mon école secondaire pour y emprunter des romans, souvent plusieurs par semaine. Ayant toujours eu un faible pour les littératures de l’imaginaire et plus particulièrement les romans de fantasie (c’est-à-dire les histoires se déroulant dans des univers moyenâgeux remplis de magie, de guerres et de créatures mythologiques), j’aimais bien me gâter un peu et emprunter des livres de la collection « Les Royaumes oubliés », regroupant des récits inspirés d’un univers conçu à l’origine pour le jeu Donjons et Dragons. Malgré ce que vous pensez peut-être, je ne ressentais absolument aucune honte à aller emprunter ce genre de livres, même si être geek n’a pas trop la cote à l’adolescence. Ce qui me mettait hors de moi, c’est que chaque fois que je passais au comptoir de prêts pour faire enregistrer mon emprunt, la bibliothécaire (qui me connaissait bien et savait que j’empruntais des livres de cette collection de façon régulière) ne manquait pas de m’adresser le commentaire suivant: «Ça m’étonne que tu lises ça, c’est des …

Le lecteur et les best-sellers

Best-seller. Cette expression, utilisée abondamment dans le monde littéraire, n’a pas la même signification pour tout le monde. Dans le milieu de l’édition, cela signifie un livre qui a connu un immense succès commercial, qui s’est énormément vendu par rapport aux autres livres du même genre. Dans la tête de bien des gens, un best-seller est un livre qui doit forcément être bon, étant donné la quantité de lecteurs qui l’ont acheté… non? Eh bien, ce n’est pas totalement faux… ni totalement vrai. L’autre jour, au travail, j’ai décidé d’ouvrir l’œil et, en plaçant les livres sur les rayons, je me suis efforcée de repérer ceux sur lesquels figurait la mention « best-seller ». Verdict? Énormément de livres portent cette mention, à un point tel que j’ai renoncé à compter. Le plus fascinant dans tout ça était sans contredit le fait qu’il y avait, dans le lot, de nombreux ouvrages dont je n’avais jamais vraiment entendu parler dans les médias, ni même par bouche à oreille. Bon, je sais, il m’est impossible de connaître tous les livres …

Sortir de sa zone de confort (littéraire!)

En tant que libraire, je me trouve régulièrement confrontée à toutes sortes de situations concernant les livres et la littérature, situations qui s’avèrent parfois amusantes, parfois un peu exaspérantes. Mais chaque fois que je me retrouve face à la situation suivante, une partie de moi meurt un peu… (Sur cette introduction plus qu’exagérée, voici une mise en scène du drame en question.) MOI, souriante et dévouée : Bonjour! Est-ce que tout allait bien pour vous? CLIENT, l’air vaguement hésitant : Oui, ben, peut-être que vous pourriez m’aider… MOI, prête à tout : Vous cherchez quelque chose en particulier? CLIENT, décidé à poser sa question : Oui, en fait, j’aimerais un livre pour mes vacances… MOI, en fine détective : Ok! Qu’est-ce que vous lisez, normalement? CLIENT, songeur, puis motivé : Hum… Je lis souvent du Musso, du Levy**… mais j’aimerais faire changement, un peu! Vous savez, aller vers autre chose, essayer du nouveau, là, un autre genre, d’autres auteurs! MOI, heureuse de pouvoir jouer les conseillères : Parfait! Voyez-vous, par exemple, il y aurait… De …